Page:Tourgueniev - Dimitri Roudine, 1862.djvu/45

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voir, dit Daria Michaëlowna. Puis elle le présenta à toutes les personnes qui se trouvaient là, et lui demanda s’il habitait le pays, ou s’il y venait seulement en voyageur.

— Mon bien est dans le gouvernement de T***, répondit Roudine en tenant son chapeau sur ses genoux. — Il n’y a pas longtemps que je suis ici ; j’y suis venu pour affaires, et je demeure en ce moment dans votre ville de district.

— Chez qui ?

— Chez le médecin. C’est un ancien collègue de l’Université.

— Ah ! vous demeurez chez le médecin… On en dit le plus grand bien. Il paraît qu’il est très-habile dans son art. Y a-t-il longtemps que vous connaissez le baron ?

— Je l’ai rencontré cet hiver à Moscou, et je viens de passer près d’une semaine chez lui.

— C’est un homme très-intelligent que le baron.

— Oui, très-intelligent.

Daria Michaëlowna se mit à respirer un nœud qu’elle avait fait avec son mouchoir de poche et qu’elle avait imbibé d’eau de Cologne.

— Êtes-vous au service ? demanda-t-elle.

— Qui ? moi ?

— Oui, vous.

— Non… J’ai donné ma démission.

Il y eut un moment de silence. La conversation redevint générale.