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tendance active vers la perfection, est la source de toute grandeur. Oui, l’homme doit briser l’opiniâtre égoïsme de sa personnalité, afin de pouvoir se manifester librement.

— Ne pourriez-vous me prêter un petit crayon ? demanda Pigassoff à Bassistoff.

Bassistoff fut un instant à comprendre cette question.

— Un crayon, pourquoi faire ? répondit-il enfin.

— Pour écrire cette dernière phrase de M. Roudine. Elle est à conserver. Si on ne l’inscrivait pas, on pourrait l’oublier, et ce serait un grand malheur.

— Il y a des choses dont on ne doit ni rire ni plaisanter, répliqua Bassistoff avec chaleur en se détournant de Pigassoff.

Pendant ce temps, Roudine s’était approché de Natalie. Elle se leva, son visage exprimait le trouble. Volinzoff, qui était assis à côté d’elle, se leva aussi.

— Voici un piano, dit Roudine ; jouez-vous ?

— Oui, répondit Natalie, mais voilà Konstantin Diomiditch qui joue beaucoup mieux que moi.

Celui-ci releva la tête et montra ses dents.

— C’est mal à vous de dire cela, Natalie Alexiewna. Vous êtes tout aussi forte que moi.

— Connaissez-vous le Erlkönig de Schubert ? demanda Roudine.

— Certainement, certainement, répondit Daria Michaëlowna. Mettez-vous au piano, Konstantin. Vous aimez la musique, Dimitri Nicolaïtch ?