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CHAPITRE V


« Monsieur Goubaref, chez lequel j’ai eu aujourd’hui le plaisir de vous voir, commença-t-il, ne m’a pas nommé ; si vous le permettez, je vais le faire moi-même. Je m’appelle Potoughine, conseiller de cour en retraite ; j’ai servi à Pétersbourg, au ministère des finances. J’espère que vous ne trouverez pas étrange… je n’ai généralement pas l’habitude d’aborder ainsi les gens… mais avec vous… »

Ici Patoughine resta court et pria le garçon d’apporter un petit verre de kirschwasser. « Pour prendre courage, » ajouta-t-il en souriant.

Litvinof examina avec un redoublement d’attention ce dernier personnage, et se dit aussitôt : « Celui-ci n’est pas comme les autres. »

En effet, il en était fort différent. C’était un homme à larges épaules, ayant un grand buste sur de courtes jambes, une tête tout ébouriffée, des yeux très intelligents et très mélancoliques, ombragés par d’épais sourcils, une bouche régulière, de mauvaises dents et un de ces nez foncièrement russes, que l’on appelle communément pommes