Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/234

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rose se détache au milieu du sombre feuillage ; une jeune figure se montre sous la frange légère d’une ombrelle… Arcade a reconnu Katia, et elle l’a reconnu aussi. Il donne ordre au cocher d’arrêter les chevaux qui galopaient toujours, saute à terre et court à elle.

— C’est vous ! s’écria Katia, et elle rougit lentement. — Allons trouver ma sœur ; elle est là dans le jardin ; il lui sera très-agréable de vous revoir.

Katia conduisit Arcade dans le jardin. La manière dont il l’avait rencontrée lui paraissait d’un bon augure ; il la retrouvait avec autant de joie que si elle avait été une de ses proches parentes. Tout était pour le mieux : point de maître d’hôtel aux gestes solennels, point d’attente dans le salon. Il aperçut madame Odintsof au bout d’une allée ; elle lui tournait le dos et se retourna doucement au bruit de leurs pas. Arcade fut sur le point de perdre de nouveau contenance, mais les premières paroles qu’elle prononça le rassurèrent complètement.

— Bonjour, fuyard ! dit-elle de sa voix égale et caressante, et elle s’avança vers lui en souriant et en clignant les yeux à cause du vent et du soleil. — Où l’as-tu trouvé, Katia ?

— Je vous apporte, commença Arcade, une chose à laquelle vous ne vous attendez guère…

— Vous vous êtes apporté vous-même, voilà l’essentiel.