Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Cela dépend ; je n’en sais rien. Eh bien, est-ce convenu ? Nous partons ?

— Soit, répondit Arcade avec insouciance.

Il était très-content au fond de la proposition que venait de lui faire son ami ; mais il croyait nécessaire de ne point le laisser voir : c’était se conduire en vrai nihiliste.

Le lendemain il partit avec Bazarof pour X… La jeunesse de Marino regretta leur départ ; Douniacha versa même quelques larmes…, mais Paul et son frère, les vieux, comme disait Bazarof, respirèrent plus librement.


XII


La ville de X…, où se rendirent les deux amis, avait pour gouverneur un homme encore jeune, à la fois progressiste et despote, comme il y en a tant en Russie. Pendant la première année de son entrée en fonctions, il avait trouvé moyen de se brouiller non-seulement avec le maréchal de la noblesse, chef d’escadron d’état-major en retraite, grand éleveur de chevaux, homme du reste très-hospitalier, mais même avec ses propres employés. Les différends qui en étaient résulté avaient pris de telles proportions, que le ministre se vit obligé d’envoyer sur les lieux un fonctionnaire de confiance pour débrouiller les choses. Il confia cette mission à Matveï Ilitch Koliazine, fils du Koliazine