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Page:Tourgueniev - Premier Amour, trad. Halpérine-Kaminsky.djvu/206

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PREMIER AMOUR

public, je rencontrai Louchine à ma grande satisfaction. Je l’aimais pour son caractère franc, puis il m’était cher pour les souvenirs qu’il réveillait en moi. Je me précipitai vers lui.

— Ah ! prononça-t-il, puis il fronça le sourcil. C’est vous, jeune homme, voyons que je vous examine. Vous êtes toujours jaune ; mais vous n’avez plus cette vilaine expression dans les yeux ; vous avez l’air d’un homme maintenant, plus d’un chien d’appartement. C’est bien. Racontez-moi alors : vous travaillez ?

Je soupirai ; je ne voulais pas mentir et j’avais honte de dire la vérité.

— N’importe ! Ne vous découragez pas, reprit Louchine, la principale chose c’est la vie normale et savoir se soustraire aux influences ; autrement qu’est-ce qui en arrive ? On est mal partout où le flot ne vous porte pas naturellement : alors même que l’homme