Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

berté quand ils veulent, ou ils les retiennent à leur service pendant toute leur vie. Ce qu’il y a de loüable dans cette vie libertine, c’est que les enfans que les Turcs ont de toutes leurs femmes, heritent également des biens de leur pere, avec cette difference seulement, qu’il faut que ceux des esclaves soient déclarez libres par Testament. Si le pere ne leur fait pas cette grace, ils suivent la condition de leur mere, et sont à la discretion de l’aîné de la famille.

Quoique les femmes en Turquie ne se montrent pas en public, elles ne laissent pas d’être magnifiques en habits, leurs chausses sont semblables à celles des hommes, et descendent jusqu’aux talons en maniére de pantalon, au bas duquel est cousu un chausson de marroquin fort propre. Ces chausses sont de drap, de velours, de satin, de brocard, de boucassin, ou de toile claire, suivant la saison et la qualité des personnes. Il y a dans Constantinople des femmes débauchées et perduës à tel point, que faisant semblant de racommoder leur veste, elles montrent en pleine rüe tout ce que la modestie ordonne de cacher, et gagnent leur vie à ce détestable mestier. Les femmes Turques portent sur la chemise une camisole piquée, et pardessus la camisole une espece de soutane d’une riche etoffe : cette soutane est boutonnée jusques au dessous du sein, et serrée par une ceinture de soye ou de cuir, avec des plaques d’argent enrichies de pierreries. La veste qu’elles mettent sur cette soutane est d’une etoffe plus ou moins épaisse suivant les saisons, et la fourrure en est plus ou moins chere suivant leur état ; elles croisent souvent une partie de la veste sur l’autre, et les manches tombent jusques aux bouts des doits qu’elles cachent quelquefois dans les ouvertures qui sont à costé de la veste ; leurs souliers sont tout à fait semblables à ceux des hommes, c’est à dire garnis d’un demi cercle de fer en place de talon.