même diligence que les autres. Il rétablit les habitans dans la possession de leurs biens et leur rendit toutes sortes de bons offices ; frappé de ce qu’il avoit veû en songe le fondateur de leur ville le jour qu’il y fit son entrée. Les Romains y envoyérent une Colonie, laquelle occupa une partie de la ville et de la campagne. Cette campagne est encore aujourd’hui telle que Strabon l’a dépeinte, c’est à dire, que le terrein qui est entre la ville et le Cap est rempli de jardins et de champs. Appien rapporte la prise de Sinope d’une autre maniére, neanmoins il convient du songe et de la clemence de Lucullus. Ce General, selon Plutarque, en poursuivant les fuyards, trouva sur le bord de la mer la statuë de ce même Autolycus, laquelle ils n’avoient pas eû le temps d’embarquer, et la fit enlever. C’étoit un bel ouvrage auquel on rendoit des honneurs divins et qui, suivant la croyance des peuples, rendoit des Oracles.
Il y a apparence que l’on frappa dans ce temps-là à Sinope la Médaille que j’en ay apportée, ou du moins que c’est à l’occasion de Lucullus qu’elle y fut frappée. D’un côté c’est une teste nuë à la Romaine, laquelle me paroit celle de ce General ; au revers c’est une corne d’abondance qui marque les richesses que les Ports de Sinope y attiroient. Elle est placée entre les deux bonnets de Castor et de Pollux ; et ces bonnets qui sont surmontez d’autant d’étoilles, nous apprennent que ces enfans de Jupiter et de Leda favorisoient la navigation des Sinopiens. Les Colonies qu’ils avoient fondées marquent que leur puissance sur mer s’étendoit bien loin ; mais il n’y a rien de plus glorieux pour cette ville, que le secours qu’elle donna au reste de l’armée des Dix mille Lacedemoniens, dont la retraite fait un des plus beaux morceaux de l’Histoire grecque.