Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/226

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Les Sinopiens affectérent même, sous les Empereurs Romains, de conserver à leur ville le nom de Colonie Romaine. Patin nous a donné le type de deux Médailles dont les legendes en font mention, l’une est à la teste de Caracalla, et l’autre à celle de Geta : celle-ci a pour revers un poisson, et me fait souvenir du grand commerce de poisson qu’on fait encore aujourd’hui en cette ville. Hormis les cables et les cordes que l’on y charge pour Constantinople, on n’y trafique qu’en salines et en huile de poisson. Les principales salines sont les Maquereaux et les Pelamides ou jeunes Thons. Les huiles se tirent des Dauphins et des veaux de mer. A l’égard de la Médaille de Caracalla, elle répresente Pluton à demi couché sur un lit ; sa teste est chargée d’un boisseau, une aigle s’appuie sur le poing de sa main gauche, et il tient de la droite une haste pure, c’est à dire une lance sans fer. Tacite aprés avoir parlé des prétendus miracles de Vespasien qui avoit rendu la veüe à un aveugle et fait marcher un estropié dans la ville d’Alexandrie, raconte de quelle maniére la statuë de Pluton, ou du Jupiter de Sinope, fut transportée à Alexandrie par ordre de Ptolemée premier Roy d’Egypte. Ce Prince envoya une celebre Ambassade au Roy de Sinope, appellé Scydrothemis, lequel gagné par des présens d’un grand prix, aprés avoir amusé les députez pendant trois ans sous divers pretextes, permit enfin que le Dieu partît ; mais ce ne fut pas sans miracle. Pour satisfaire apparemment le peuple qui envioit un si grand bonheur à l’Egypte, et qui apprehendoit les suites fâcheuses du départ de cette divinité ; on fit courir le bruit que le Temple étoit tombé, et que la statüe étoit venüe s’embarquer d’elle-même et de son bon gré. Que ne dit-on pas quand on veut parler miracle ? Le bruit se répandit qu’elle avoit passé dans trois jours