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serré, chaque fleur est pourtant soutenuë par un pedicule long d’environ 15 lignes. Les fleurs ont deux pouces de diametre, composées de 5 ou 6 feüilles blanches d’un pouce de long sur 8 ou 9 lignes de largeur, arrondies à leur pointe, mais pointuës à leur naissance. Le milieu de ces feüilles est occupé par un pistile ou bouton à plusieurs graines, terminées par un filet crochu et couvertes d’une touffe d’étamines blanches de demi pouce de long, chargées de sommets jaune-verdâtre, longs d’une ligne. Ces fleurs sont sans calice, sans odeur, sans acreté, de même que le reste de la plante. Il y a des pieds dont les fleurs tirent sur le purpurin. Nous n’eûmes pas le temps d’en arracher la racine.

Le 6 Juin nous partimes à trois heures du matin, et nous traversâmes jusques à midi de grandes montagnes toutes pelées, et dont la veuë est fort desagréable, car on n’y découvre ni arbres ni arbrisseaux, mais seulement une méchante pelouse brulée par la neige qui étoit nouvellement fonduë. Il y en avoit encore beaucoup dans les fonds, et nous campâmes tout auprez. Cette pelouse étoit couverte en quelques endroits de cette belle espece de Violette à grandes fleurs, jaunes sur certains pieds, violet-foncé sur d’autres, panachées de jaune et de violet sur quelques-uns, jaune rayé de brun avec l’étendart violet et d’une odeur tres agréable.

On se leva sur les deux heures du matin le 7 Juin, pour partir à trois heures ; l’on continüa la route par des montagnes pelées et parmi la neige. Le froid étoit âpre, et les broüillards si épais, qu’on ne voyoit pas à quatre pas les uns des autres. Nous campâmes sur les 9 heures et demi dans une vallée assez agréable par sa verdure, mais fort incommode pour les voyageurs. On n’y trouve pas une branche de bois, pas même une bouze de vache ; et