Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/324

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glet, laquelle est aussi plus ou moins obscure. Les feüilles intérieures sont un peu plus étroites que les extérieures, et tiennent fortement contre le pedicule ; souvent même elles ne tombent que deux jours aprés que la tige est coupée. Le milieu de la fleur est rempli par un pistile long d’un pouce, oblong, spherique sur quelques pieds, vert-pâle, lisse, arrondi vers le haut en maniére de calote purpurine découpée en pointe sur les bords, et relevée d’environ une douzaine de bandes violet foncé, poudreuses, lesquelles, partant du même centre, viennent se distribuer en rayon et se terminer à une des pointes qui sont sur les bords. Ce pistile est surmonté par une grosse touffe d’étamines à plusieurs rangs, grisdelin luisant, chargées chacune d’un sommet violet foncé, poudreux, long d’une ligne et demi sur demi ligne de large. La Plante rend un suc limpide, mais le pistile est rempli d’un laict blanc-sale tres amer et tres acre, de même que la racine. Ce pistile devient un fruit ou coque. Cette belle espece de Pavot se plaît fort au Jardin du Roy, et même en Hollande où nous l’avons communiquée à nos amis. Mr Commelin, tres-habile Professeur de Botanique à Amsterdam, en a donné la figure.

Nous retournâmes le 24 Juin à Erzeron, où nous apprîmes par Mr Prescot qui est Consul de la nation Angloise depuis 10, ou 12 ans, qu’il y avoit deux Caravanes prêtes à partir, l’une dans trois jours pour Tocat, et l’autre dans 10, ou 12 jours pour Teflis. Nous prîmes le parti d’aller à Teflis, non seulement pour voir la Georgie, qui est le plus beau pays du monde, mais aussi pour cueillir à nôtre retour les graines de tant de belles Plantes que nous avions observées autour d’Erzeron. On assûroit de plus qu’il y avoit beaucoup de voleurs sur le chemin de Tocat, qui se retireroient suivant leur coûtume ordinaire sur