Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/337

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composé de deux parties arrondies sur le dos, garnies dans leur longueur de petites ailes ou feüillets membraneux et blancs comme le fruit du Laterpitium. Il faut pourtant rapporter nostre Plante au genre de Cachrys, parce que les parties de son fruit sont spongieuses, épaisses de trois lignes et remplies d’une graine plus grosse qu’un grain d’orge. Les feüilles de cette Plante sont un peu aromatiques, mais tres acres et tres ameres.

Le 10 Juillet nous partîmes à 3 heures aprés minuit, et marchâmes jusqu’aprés midi par des montagnes agréables et bien fournies de Pins. A la verité nous n’étions pas trop attentifs à les considérer, car nous découvrions de temps en temps quelques pelotons de voleurs armez de lances et de sabres. Ils n’oserent pourtant nous attaquer, parce qu’ils nous crurent les plus forts ; cependant ils se trompoient tres fort, et ils auroient eû bon marché de nous s’ils s’étoient approchez. Nous avions assez de Turcs dans nôtre Caravane, mais les Armeniens, à ce que nous apprîmes par nos Drogmans, commençoient à parler entre eux d’accommodement, et si les voleurs ne s’étoient pas écartez, on n’auroit pas manqué de leur envoyer un Deputé pour traiter de la rançon. Nous n’en fûmes pas quittes pour cette allarme. Nos marchands crurent que ces voleurs étant à nos trousses, nous leur avions dérobé une marche : si la chose étoit ainsi elle s’étoit passée fort innocemment de nôtre part, car aucun de nous n’avoit pensé à les tromper ; heureusement nous n’entendîmes plus parler d’eux. Nous descendîmes le lendemain, des montagnes sur les dix heures pour entrer dans une assez belle plaine où nous campâmes à Chatac méchant village sur un ruisseau qui tombe de quelques collines où l’herbe ne faisoit que de naître. A peine trouvoit-on à faire paître les chevaux dans les meilleurs fonds.