Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/383

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pour Mahomet. Quand une personne de considération est malade, on consulte les devins Georgiens, Armeniens, Mahometans : ces malheureux assûrent ordinairement qu’un tel saint ou qu’un tel prophète est en colere ; que pour l’appaiser et pour guerir le malade, il faut égorger un mouton et faire plusieurs croix avec le sang de cet animal : aprés la céremonie on en mange la viande, soit que le malade guerisse ou non. Les Mahometans ont recours aux saints Georgiens, les Georgiens aux saints Armeniens, et quelquefois les Armeniens aux prophetes Mahometans ; mais ils sont tous d’intelligence pour faire des frais aux malades, et suivant l’inclination ou la devotion des pareils, ils choisissent leurs saints.

Les femmes et les filles sont mieux instruites de leurs superstitions, que les hommes. On éleve la pluspart des Georgiennes dans des Monasteres où elles apprennent à lire et à écrire. Elles y sont reçües Novices, ensuite Professes, apresquoi elles font les fonctions Auriales, comme de baptiser et d’appliquer les saintes huiles. Leur religion est proprement un mêlange de la Greque et de l’Armenienne. Il y a quelques femmes Mahometanes dans Teflis qui sont Catholiques en secret, et celles-là sont meilleures Catholiques que les Georgiennes, parce quelles sont bien instruites. La fille du Visir, dans le temps que nous y êtions ; la femme du Medecin du Prince et quelques autres, à ce que nous assûrerent les Capucins, avoient êté baptisées en secret. Ces Religieux les confessent et leur donnent la communion en les visitant chez elles, sous pretexte de leur donner des remedes pour des maladies supposées, et elles viennent quelquefois dans leur Eglise où elles se tiennent debout sans oser donner aucune marque de leur foy. Dans la derniere révolte du Prince George, qui fit soulever tout le pays contre le Roy de