Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/44

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qu’ils peuvent de les faire incliner, ce qui ne leur réussit pas, car les Ambassadeurs avertis de ce qui se doit passer, se tiennent ferme et se roidissent de toutes leurs forces. Aprés avoir fait leur réverence ils restent seuls dans la sale avec le Secretaire de l’Ambassade et l’Interpréte, à qui ils remettent les Lettres de leur Prince aprés les avoir décachetées ; cet Interpréte les explique, ensuite ils se retirent. Le Sultan saluë l’Ambassadeur avec une légére inclination de tête, ils s'entretient un moment avec les Visirs sur le sujet de l’Ambassade, et il délibere sur les affaires dont il est question, supposé qu'elles soient de conséquence. Le Grand Visir s’en retourne au Divan, où il reste jusques à midi qui est l’heure que le Conseil doit finir : aprés quoi il se retire chez lui précédé de deux compagnies, l’une de Janissaires, l’autre de ses Chiaoux à cheval, de sa Garde à pied, et suivi d'une infinité de gens qui forment une Cour tres nombreuse.

L’Empereur se fait rendre compte ordinairement le jour du Divan par les principaux Officiers, de tout ce qui s’est passé dans l’assemblée, et principalement du devoir de leurs Charges. Ils sont mandez pour cela l’un aprés l’autre. Le Janissaire Aga voyant venir à lui le Capigi Bachi et le Chiaoux-Bachi, s’avance avec quatre Capitaines de ses troupes, qui l’accompagnent jusques à l’apartement du Prince ; il les conjure à cette porte de prier Dieu qu’il inspire au Sultan le pardon de ses fautes. Il entre seul pour subir son interrogatoire et s’en retourne en paix, si le Prince est satisfait de sa conduite : si le Sultan le trouve coupable, il frappe du pied à terre, et à ce signal les Muets étranglent l’Aga sans autre formalité.

Le Spahis-Aga est mandé chez le Grand Seigneur pour le même sujet ; mais il en sort ordinairement plus content, je ne sçai pas quelle en est la raison. Les autres Grands de