Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/629

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nese ou l’Isle aux Mulots, dont toute la côte d’Asie est infectée. Les deux principaux sommets de cette montagne s’appellent les Freres, parce qu’ils paroissent égaux, et qu’ils sont l’un contre l’autre comme deux jumeaux. Les Provençaux leur ont donné le nom de Poussos, c’est à dire Mamelles, suivant l’idée des anciens Grecs qui regardoient les pointes des montagnes comme des mamelles. Mr Morel qui a surpassé les plus grands Antiquaires de son temps, par la correction admirable de ses desseins, a crû que Clazomene étoit l’ancienne ville de Grynée qui avoit donné le surnom de Grynéen à Apollon. Cybele, la mere des Dieux, étoit fort venerée à Clazomene et portoit le nom de la ville, comme on le voit sur les Médailles de Valerien. On y adoroit aussi Diane aux blancs sourcils, comme nous l’apprenons par quelques Médailles de Gallien. Il y auroit plaisir d’aller foüiller dans les ruines de Vourla.

Quelques jours aprés nous allâmes au vieux Château de Smyrne, situé sur la colline qui domine la ville. Les Turcs ont achevé de démolir un des plus beaux Theatres de marbre qui fût en Asie, et qui occupoit la croupe de cette montagne du côté qui regarde la rade. Ils ont employé tous ces marbres à bâtir un beau Bezestein et un grand Caravanserai. L’ancien Château, bâti par Jean Ducas, est au sommet de cette colline ; son enceinte est irreguliere et se ressent du temps des derniers Empereurs Grecs, sous lesquels on employoit les plus beaux marbres parmi la maçonnerie des murailles des villes. On voit au devant de la porte de ce Château, un arbre fameux, parce que les Grecs prétendent que c’est un rejetton du bâton de Saint Polycarpe. Autant que j’en pus juger, au commencement de Janvier, par une branche que j’en fis couper et qui commençoit à perdre ses feüil-