Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/74

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tiens, qui sont la cause du mal qu’ils souffrent : neanmoins on ne manque pas de leur dire que la maladie est dangereuse, et qu’on sera peutêtre obligé de faire quelque amputation. Les Turcs jurent de leur côté qu’ils n’ont eû aucun commerce avec femme ni fille qui puissent être suspectes : enfin on envelope la partie malade avec des linges trempez dans l’oxicrat que l’on a coloré avec un peu de bol, et on leur vend ce remede comme un grand spécifique pour ces sortes de maux.

Quand ils vont à la garderobe chez eux ou à la campagne, ils font provision de deux grands mouchois qu’ils portent à leur ceinture, ou qu’il smettent sur les épaules comme les maîtres-d’hôtel font la serviette : dans cet equipage ils portent à la main un pot plein d’eau qui leur sert pour faire le Taharat, c’est à dire pour se laver et relaver le fondement avec le doit. Le Grand Seigneur lui-même ne sauroit s’en dispenser, et c’est la premiere instruction que son Gouverneur lui donne ; il est à présumer qu’aprés cette operation les Turcs se lavent et s’essuyent souvent le bout des doits. Ce n’est pas là le seul inconvenient, il peut survenir bien des choses qui rendent cette ablution inutile, et qui obligent à la recommencer de nouveau, par exemple si on laisse échapper quelque vent : mais le malheur est bien plus grand si on a le cours de ventre, auquel cas cette ablution qui doit être souvent réiterée, devient une cérémonie tres fatigante. J’ai oüi dire à des Turcs, qu’une des principales raisons qui les empéchoit de voyager en païs de Chrétienté, c’êtoit de ne pouvoir pas faire de pareilles fonctions assez à leur aise.

A l’égard de l’ablution particuliere, il faut y revenir pour la moindre faute, comme pour s’être mouché avec la main droite ; pour s’être lavé les parties du corps plus de trois fois ; pour avoir employé à cet usage de l’eau échaufée