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LES FERMENTS

Combien de miséreux ployés sous le fardeau !
Pour un piètre michon et pour un verre d’eau
Qu’ils viennent mendier aux portes de service
Et que vous refusez en condamnant le vice,
Combien de vos festins n’ont-ils pas défrayés ?
De la grève en haillons vous êtes effrayés,
Mais vous thésaurisez le sang de la Misère !
Combien de mutilés vous ont rendus prospères ?
Demandez maintenant ce que valent mes bras
Pour grandir un pays que vous tondez à ras.
Vous inspirez la haine à l’ouvrier des villes,
Ce fils de paysans dont les mains sont serviles,
Et vous le rendez lâche en lui donnant l’orgueil,
Pour hâter sa descente à l’oubli du cercueil.
Car c’est vous, les cités, par vos fêtes menteuses,
Qui créez aux guérets des âmes vaniteuses,
Et jetez dans la rue en groupes désœuvrés
Les phalènes du sol vers l’Idole attirés.
Les humbles peuvent bien nier vos consciences,
Et tuer le repos, pour que la patience