Page:Tremblay - Les ferments, 1917.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
74
LES FERMENTS

Je veux que ma vigueur allège les fardeaux
Chez ceux-là qui demain quitteront leurs bandeaux.
Je crois en l’avenir et pour lui je travaille
En réveillant le pain qui dort sous la broussaille.
La hache en main, j’abats l’ombre des pins géants,
Et rouvre aux feux du ciel tous les pores béants,
Afin que le soleil verse à foison la vie
Dans l’ombre où sa lumière ardemment poursuivie
Laissait mourir le germe et pâlir le ferment.
Je porte en l’abatis le chaud effarement
Du fer et de la flamme, et délivre la terre,
Que l’azur reconquis soulage et désaltère,
En noyant de ses rais l’éveil des noirs limons.
Puis je conduis le soc sous l’effort des timons,
Et le sol rudoyé des brûlantes novales
Féconde en ses retraits les gloires estivales.
Les blés semés, germés, dorés, mûris, coupés,
Pour remercier Dieu rouvrent les poings crispés.
Ce n’est pas en voyant s’épanouir la glèbe
Sous le regard ému des vieux et de l’éphèbe