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Page:Trent - Litterature americaine.djvu/346

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338 LA PihîIODE LOCALP. (1830-1865)

mettre sa poésie en accord avec la science moderne et fit de louables efforts pour remplir sa mission de barde et de prophète. Il n’est pas certain que son effort ait avorté d’une manière plus insigne que celui de Wordsworth et d’antres poètes qui se sont cru une mission à remplir, et que ce ne soit pas sa poésie plutôt que son évangile, qui l’ait préservé de l’échec. A-t-il réussi dans sa tentative de représenter la société de son temps, comme Balzac ? Ce sont là des questions dont l’avenir seul peut décider.

Pour ce qui est de son stvle en général, nous serons également brefs. Whitmau paraît être à la fois la victime et du jargon et du « cant ». Ses énumérations, ses vers traînants, ses locutions étrangères sans à-propos, sont aussi peu spontanés, aussi peu appropriés à ses desseins et sujets que tout le maniérisme des âges de la pédanterie. Ce n’est pas là, nous l’avons dit, qu’à peine un véritable indice de décadence, et d’autre part on ne peut y voir affectation pure et simple. C’est bien plus probablement le résultat d’une pauvreté d’art innée, d’un mélange de véhémence excessive et de culture insuffisante. Il est bon de dire, toutefois, que sur certains lecteurs l’effet produit est une sorte d’hypnotisme et que Whitman, pendant la seconde moitié de son existence, paraît s’en être beaucoup affranchi. Par suite, celui qui aborde Whitman devrait lire les Leaves of Grass en commençant par la fin. Quant à son rvthme libre, il suffit de dire que lui aussi possède un effet hypnotique et qu’il satisfait des oreilles très exercées. Whitman aimait la musique et il y a de la musique dans ses meilleurs vers, qui, sans être absolument métriques, ne sont pas pour cela dépourvus de rvthme. Que les compositions qui utilisent ce rythme soient dignes de porter