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ADO — ADO


Notæ Theologicæ 14, 15 & 16e Dissertation, explique diverses sortes d’adoptions, dont l’une se faisoit au Baptême, l’autre par l’épée, & la dernière par les cheveux. M. de Cordemoy a cependant remarqué à la fin de l’Histoire de Dagobert, que l’adoption étoit permise quand on n’avoit point d’enfans ; elle se faisoit devant le Roi, qui en donnoit des lettres ; & celui qu’on adoptoit étoit considéré comme fils : il jouissoit dès ce moment des biens de son pere adoptif, à la charge de lui fournir toutes les choses dont il avoit besoin pour vivre commodément suivant sa condition.

☞ ADOPTION. s. f. On le dit aussi quand on adopte un sentiment.

☞ ADOR. Ville, ou Château de la Terre-Sainte, dont il est parlé I. Mach. XIII. 20. Adrichomius prétend avec assez de fondement, que c’est la même chose que Dor.

ADORABLE. adj. m. & f. Digne d’être adoré, qui mérite le plus profond des respects. Adorandus. Dieu seul est adorable. Les mystères de la Religion sont adorables.

Adorable, se dit aussi abusivement & hyperboliquement des choses du monde qu’on aime infiniment. Venerandus. Les amans trouvent leurs maitresses adorables : c’est une exagération amoureuse.

ADORATEUR, atrice. s. m. & f. Celui ou celle qui adore, qui rend un culte, & des hommages religieux, Cultor, venerator, Cultrix. Les adorateurs du vrai Dieu. Il y a beaucoup d’observateurs des coutumes, & des bienséances, mais peu d’adorateurs en esprit & en vérité. Flech. S. Benoît forme des hommes que Dieu a destinés, & qu’il appelle à une vie parfaite ; ce sont de véritables adorateurs qu’il institue. Abbé de la Tr.

On le dit abusivement de celui qui estime, ou qui aime passionnément, ou qui admire extrêmement. Ce galant est l’adorateur de toutes les belles. Les femmes du monde font vanité de traîner avec elles une foule d’adorateurs. S. Evr. Ce Poëte est l’adorateur de ses propres ouvrages. On le dit encore de ceux qui font la cour avec trop de soumission & de bassesse, aux personnes élevées au dessus d’eux. Les favoris trouvent plus d’adorateurs que d’amis. Bouh.

Je n’ai percé qu’à peine,
Les flots toujours nouveaux d’un peuple adorateur,
Qu’attire sur ses pas sa prochaine grandeur. Rac.

Adorateurs d’un bien fragile,
Dupes d’un cœur ambitieux,
Jusques à quand un cœur d’argile
Charmera-t-il nos foibles yeux ?
Recueil des vers imp. par le P. Bouhours.

ADORATION. s. f. Action par laquelle on rend le plus grand des respects, & des honneurs divins, soit par une posture humiliée, soit par d’autres actes d’une profonde soumission. Culte suprême qui n’appartient qu’à Dieu. Adoratio. L’adoration suprême n’est dûe qu’à Dieu. Notre culte & nos adorations sont absolument inutiles s’il est vrai que Dieu a décidé de nous par un décret éternel. Port-R. Le plus grand des péchés est l’adoration des Idoles.

On le dit aussi des choses & des personnes, pour lesquelles on a beaucoup d’amour & d’admiration, & une estime accompagnée d’un profond respect. Cultus, veneratio. L’amour que les peuples ont pour un Prince vertueux & bienfaisant, va jusqu’à l’adoration. Les femmes qui ont de la beauté, s’imaginent que nous leur devons des adorations comme à des divinités. S. Evr. Un Prince accoutumé à l’adoration, n’écoute des remontrances qu’avec impatience.

On crée un Pape par l’adoration, ou par le scrutin. L’élection par l’adoration se fait lorsque les Cardinaux vont brusquement, & comme inspirés du S. Esprit, à l’adoration d’un d’entr’eux, & le proclament Pape. Cette manière d’élection est dangereuse, parce qu’étant confuse & tumultueuse, & n’étant point accompagnée d’une délibération tranquille, il arrive qu’elle se fait par surprise. Car les indifférens se laissent entraîner sans réflexion dans ces occasions imprévues ; & ceux qui ont d’autres vues,


n’osant se hasarder à être les derniers à donner leur consentement au nouveau Pape, se joignent presque malgré eux au torrent qui les emporte. Hist. des Concil. ☞ On appelle aussi adoration du Pape, l’hommage extérieur que les Cardinaux rendent au Pape qui vient d’être élu. Lorsque le Pape est élu, il est placé sur l’autel, & les Cardinaux vont à l’adoration, c’est-à dire, se prosternent devant lui. C’est le premier hommage qu’on lui rend, pour reconnoître la supériorité attachée à la place éminente de Vicaire de Jésus-Christ.

☞ Les Filles ou Religieuses de l’Adoration perpétuelle. Ce sont des Religieuses Bénédictines, qui font profession d’adorer continuellement le Saint Sacrement ; c’est-à-dire, que jour & nuit il y en a quelqu’une dans chaque maison, qui prie devant le Saint Sacrement. On en parlera au mot Bénédictine.

ADORER. v. act. Révérer avec dévotion ; rendre un hommage souverain avec la plus profonde soumission. Adorare. Il n’y a que Dieu seul qu’on doive adorer véritablement. Les Payens adorent les Idoles. Il se met quelquefois sans régime, & alors il signifie, Faire un acte de Religion. Les Israëlites alloient adorer en Jérusalem. Fleury.

Adorer, signifie quelquefois simplement, révérer, respecter, rendre une espèce de culte subalterne, & inférieur à celui qui n’est dû qu’a Dieu. Venerari, colere. Dans ce sens on dit, adorer les Saints, qu’on honore simplement d’un culte religieux ; mais ce culte est d’un ordre inférieur à celui qu’on rend à Dieu ; adorer les reliques, les images, pour lesquelles on a seulement de la vénération.

Tu jouïs dans l’éternité
De ce soleil dont la clarté
Est sans couchant & sans aurore.
Ce feu seul te peut enflammer ;
Mais souviens-toi que je t’adore,
N’étant plus digne de t’aimer. Des Mar.

Il y a plusieurs passages, tant dans la Sainte Écriture, que chez les Écrivains Ecclésiastiques, où le mot d’adorer se dit seulement d’un simple honneur qu’on fait à quelqu’un, ou de la vénération qu’on a pour lui. La Reine Esther adora le Roi Assuérus. Le mot d’adorer, en sa plus étroite signification, & en sa première origine, ne signifie autre chose que porter la main à la bouche, Manum ad os admovere ; c’est-à-dire, saluer, faire la révérence, ou baiser les mains. Le Pape Saint Martin ayant envoyé quelques personnes de son Clergé à l’Exarque de Ravenne Callipas, qui étoit venu à Rome en 653, avec le Chambellan Théodore, & l’Armée de Ravenne ; l’Exarque les reçut dans le Palais, croyant que le Pape étoit avec eux ; mais ne l’y trouvant pas, il dit aux premiers du Clergé : Nous voulions l’adorer ; mais demain, qui est Dimanche, nous irons le trouver & le saluer. On voit ici les mots adorer & saluer employés indifféremment, & il y avoit long-temps que l’on disoit adorer l’Empereur. Fleury. L'adoration se prend en deux manières. Il y a celle que nous rendons à Dieu, seul adorable par sa nature, & qui s’appelle latrie. Il y en a une autre que nous rendons à cause de Dieu, à ses amis, & à ses serviteurs ; comme quand Josué & David adorèrent des Anges ; ou aux lieux & aux choses consacrées à Dieu, ou aux Princes qu’il a établis, comme quand Jacob adora Esaü, son frere aîné, & quand Joseph fut adoré par ses freres. Il y a aussi une adoration qui n’est qu’un honneur rendu réciproquement, comme entre Abraham & les enfans d’Hémor. Fleury, d’après Saint Jean Damascène. Le second Concile de Nicée, dans sa lettre à l’Empereur, Session sixième, explique ainsi le mot d’adoration. Adorer & saluer sont le même en Grec, προσϰυνεῖν & ἀσπαζεϑαι. Car dans l’ancien Grec ϰύνειν signifie, saluer ou baiser, & la proposition προς marque une plus forte affection. Nous trouvons la même expression dans l’Ecriture Sainte. Il est dit que David se prosterna sur le visage, & adora trois fois Jonathas, & le baisa. Saint Paul dit que Jacob adora le haut du sceptre de Joseph. Ainsi quand nous saluons la Croix, nous chantons : Nous adorons la Croix, Seigneur, & nous adorons la lance qui a percé votre côté ; ce qui manifestement n’est qu’un salut, comme il paroît en ce que nous les touchons de nos lèvres. Que si l’on trouve souvent l’adoration dans l’Ecriture & dans les Pères, pour le culte de latrie en esprit, c’est que ce mot a plusieurs significations : car il y a une autre adoration mêlée d’honneur, d’amour & de crainte ; comme quand


ils