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fruits, ou des fleurs, ou qui ne peignent que de miniature, ou qui s’appliquent à la gravure, ou à quelque autre partie qui regarde le dessein.

☞ Pour service, l’Académie de Peinture a deux Huissiers pour ouvrir & fermer les portes, & tenir l’Appartement propre : le premier fait la fonction de Concierge. Elle a encore deux hommes entretenus pour servir de modéle dans l’école.

☞ Louis le Grand a donné à cette Académie, comme aux autres, un Appartement au Louvre, composé d’un grand nombre de piéces ornées d’une grande quantité d’ouvrages excellens de Sculpture & de Peinture.

☞ L’Académie de Peinture & de Sculpture doit son établissement à Martin Charmois.

☞ Il y a deux modéles, c’est-à-dire, deux hommes bien faits de corps, que l’on expose nuds tous les jours à six heures du soir, & que l’on fait mettre en différentes postures ou attitudes, pour donner lieu de se perfectionner aux jeunes gens qui ont du génie pour le dessein, & pour apprendre de la nature même l’art de dessiner correctement. Le jour de la fête de saint Louis on distribue des prix à ceux qui ont le mieux réussi. Cette Académie tient ses assemblées au Louvre le dernier Samedi de chaque mois. Une de ses principales constitutions, est que tous ceux qui la composent, sont obligés d’exposer au public de leurs ouvrages à la saint Louis. Ils s’exposent dans les galeries du Louvre, & restent exposés pendant quinze jours.

☞ Outre-cette Académie de Peinture & de Sculpture, établie au Louvre, il y en a encore deux autres à Paris, dont l’une est à l’Hôtel Royal des Gobelins, sous les ordres de l’Académie Royale du Louvre ; & l’autre est dirigée par les Maîtres Peintres & Sculpteurs, & leur Bureau est rue des Hauts-Moulins, près de saint Denis de la Chartre.

Il y a aussi une Académie de Politique. Regia Rerum Politicarum Academia. Elle est composée de six personnes, qui se rendent certains jours de la semaine au Louvre, dans la chambre où sont les papiers & les mémoires qui regardent les affaires étrangères : ils lisent les choses qu’on leur met entre les mains, suivant les ordres de M. de Torcy, qui fait connoître au Roi leur capacité & les progrès qu’ils font, afin que Sa Majeste puisse les employer dans les affaires, selon qu’elle le jugera à propos.

Académie Royale de Musique. Regia Musicae Academia. Voyez OPERA.

Il y a aussi dans la plûpart des Villes d’Italie des Académies, dont les noms sont curieux à cause de leur bisarrerie. A Sienne on appelle les Académiciens, Intronati : à Florence, Della Crusca ; à Rome Humoristi, Lyncei, Fantastici : à Bologne, Otiosi : à Gènes, Addormentati : à Padoue, Ricovrati, & Orditi : à Vincenze, Olympici : à Parme, Innominati : à Milan, Nascosti : à Naples, Ardenti : à Mantoue, Invaghiti : à Pavie, Affidati : à Cesene, Offuscati : à Fabriano, Disuniti : à Fayence, Filoponi : à Ancone, Caliginosi : à Rimini, Adagiati : à Cita del Castello, Assorditi : à Perouse, Insensati : à Ferme, Rafrontati : à Macerata, Catenati : à Viterbe, Ostinati : à Alexandrie, Immobili : à Bresse, Occulti : à Trevise, Perseveranti : à Verone, Filarmonici : à Cortone, Humorosi : à Luques, Oscurri : Mr Pelisson en a donné ce Catalogue dans son Histoire de l’Académie. Mascurat ajoûte les Sileni, à Ferrare : les Agitati, à Cita di Castello, mettant les Assorditi à Urbin. On a dit d’un Perroquet :

Ce petit animal plein de sens & d’esprit,
N’entendoit rien qu’il ne comprît ;
Parla si bien François tout le temps de sa vie,
Que si tout son mérite avoit été connu,
Assurément il auroit eu
Une place à l’Académie. Pavill.

Il y a encore à Florence une Académie de Physique nommée del Cimentò, où l’on fait plusieurs expériences Physiques & Astronomiques. Elle a été établie par Laurent de Médicis, & est souvent citée par Francisco Redi Médecin. Au reste, l’Académie della Crusca à Florence est différente de l’Académie de Florence, laquelle est plus ancienne que celle della Crusca. On les a souvent confondues, & le Tasse même s’y méprit d’abord. Il attribua à l’Académie


de Florence la critique que quelques Académiciens della Crusca firent de ses Ouvrages dans les premiers temps de l’établissement de cette Académie. Voyez tout cela fort bien débrouillé dans l’Aminta diffesa du savant Mr Fontanini. Il falloit aussi ajoûter l’Académie des Arcadiens à la liste des autres. Car quoique ces Messieurs ne se donnent point le titre d’Académiciens, & qu’ils affectent de ne se servir que de termes conformes à la qualité qu’ils prennent de Bergers d’Arcadie, cependant on appelle Académie ce qu’ils ne veulent appeller que Ragunanza, ou Assemblée, parce qu’effectivement on se propose à peu près le même but dans leurs Assemblées que dans les autres Académies, qui sont établies pour entretenir une noble émulation parmi les Savans, & sur-tout parmi ceux qui cultivent la Poësie, & ce qu’on appelle plus particulièrement les belles Lettres. On a depuis peu établi à Venise une Académie de Savans ; une autre à Dublin, une autre à Oxford, qui travaillent à l’avancement des Sciences. Il y a eu une Académie en Allemagne, établie sous le titre d’Académie des Curieux des secrets de la Nature dans le Saint Empire Romam. L’Empereur lui donna sa protection en 1670. Elle fut établie dès 1652. par le Sieur Bauch Médecin. L’une des plus fameuses de toutes les Académies, est celle qui est établie à Londres, sous le nom de Société Royale d’Angleterre, qui est composée de plusieurs Savans de qualité, qui nous ont fait voir plusieurs beaux Ouvrages, & dont on a vû aussi d’excellens Journaux, sous le titre de Philosophical Transaction. Au reste, quoique ces Académies soient dans l’approbation commune, elles ne sont pas toutefois dans celle de ce grand Chancelier d’Angleterre, François Bacon, ni, pour le dire vrai, dans la mienne. Car je vois que du temps de Léon X. que l’on doit comparer à celui de l’Empereur Auguste, ces façons d’exercer la jeunesse avec tant de montre, de pompe & d’éclat n’étoient point en usage, desorte que l’on pourroit dire avec Pétrone à tous ces MM. les Académistes, Pace vestrâ liceat dixisse, Primi omnium eloquentiam perdidistis, &c. Mascur. Charlemagne établit par le Conseil d’Alcuin une espèce d’Académie, dont il voulut être lui-même, & qui étoit composée des plus beaux Esprits, & des plus Savans de la Cour. Dans ces conférences Académiques chacun rendoit compte des anciens Auteurs qu’il avoit lûs ; & même ceux qui en étoient, prirent chacun un nom de quelque Auteur ancien qui étoit le plus à son goût, ou de quelque homme fameux dans l’antiquité. Alcuin, dont les Lettres nous apprennent ces particularités, prit celui de Flaccus, qui étoit le surnom d’Horace ; un jeune Seigneur, nommé Angilbert, prit celui d’Homère ; Adelard, Abbé de Corbie, s’appella Augustin ; Riculfe, Evêque de Mayence, se nomma Dametas ; le Roi lui-même prit le nom de David. P. Dan. Il paroît par-là que Mr Baillet n’étoit pas assez instruit, quand il a dit que c’est en suivant le génie des gens de Lettres de son temps, amateurs des noms Romains, qu’Alcuin s’est appellé Flaccus Albinus.

l’Académie Espagnole. C’est une Académie établie à Madrid sur le modéle de l’Académie Françoise à Paris, pour perfectionner la langue Espagnole. Academia Hispanica. Dom Manuel Fernandez Pacheco, Marquis de Villena, Duc d’Escalone, Chevalier de la Toison d’or, &c. en doit être regardé comme le Fondateur. Elle s’assembla pour la premiére fois sous le bon plaisir & une permission verbale du Roi Philippe V. dans le Palais de son Fondateur, qui fut nommé Directeur. Elle demanda au Roi sa protection & une approbation authentique : le Prince la donna le 14 Octobre 1714. & accorda aux Académiciens tous les priviléges, graces, prérogatives, immunités & exemptions dont jouissent les Officiers domestiques qui sont actuellement au service dans le Palais Royal. La Compagnie ainsi autorisée, nomma de nouveau pour son Directeur le Marquis de Villena, Duc d’Escalone, pour l’être toute sa vie. Après lui les Directeurs doivent changer tous les ans. Sa devise est un creuset dans le feu, avec ces mots Espagnols : Lempia, fija, y da esplendor. Elle fit des statuts qui le 24 Janvier 1715. furent en état. La fin de cette Académie est de purifier & de perfectionner la langue Castillane. Les ouvrages de l’Académie sont un Dictionnaire, une Grammaire, une Poëtique & une Histoire de la Langue Espagnole. Il n’y eut d’abord que huit


Tome I. G ij huit