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Page:Trevoux - Dictionnaire, 1721, T01, A.djvu/16

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xij PREFACE

Si quelqu’un a commis quelque crime odieux,
S’il a trahi son pere ou blasphémé les Dieux,
Qu’il fasse un Lexicon, s’il est supplice au monde
Qui le punisse mieux, je veux que l’on me tonde.

Le travail de cette seconde édition ne s’est pas terminé à des additions ; on a non seulement revu et corrigé la premiere, mais même grand nombre d’articles que nous avons jugé avoir besoin de reforme ; car sans rien retrancher, nous nous sommes contentez d’ajoûtez le sentiment contraire & vray, & nous en avons ainsi usé d’autant plus volontiers, qu’on avoit donné l’exemple dans la premiere édition, & que le Public l’avoit trouvé bon.

L’on a marqué les lettres muettes & les accens plus exactement qu’auparavant ; ce n’est pas que dans l’impression il ne se soit encore glissé quelques fautes ; mais que l’on corrigera facilement, ou en recourant à la place propre & particuliere du mot dont on doutera, si ce n’est pas là-même qu’est la faute, ou par soi-même, si c’est là. Les accens regardent sur-tout les e : cette lettre a tant de différens sons dans notre Langue, qu’il est souvent difficile de les distinguer, tant la différence est délicate ; & quand on le pourroit toujours faire, on ne trouveroit pas dans l’Imprimerie des caractères pour en marquer exactement la distinction. Mais on peut rapporter ces différences à quatre principales, & il a fallu nous contenter de ce nombre. La première est celle de l' e muet, c’est-à-dire, qui ne se prononce point ou presque point ; cet e n’a point d’accent. La seconde est l' ê avec un accent circonflexe ; c’est lui qu’on appelle ouvert, parce qu’il se prononce en ouvrant beaucoup la bouche. La troisième est l' é fermé, qui se marque avec un accent aigu, c’est-à-dire, une petite ligne tirée de droit à gauche, & qui se prononce la bouche presque fermée. Et la quatrième, l' è qui a un accent grave, ou une ligne tirée de gauche à droite, & pour la prononciation duquel on ouvre plus la bouche que pour l' é fermé, & moins que pour l' ê ouvert. Toutes les prononciations mitoyennes entre ces quatre, sont souvent si imperceptibles, qu’il n’est presque pas possible de les discerner, ou si indifférentes, qu’il importe peu de les exprimer en parlant. D’ailleurs, dans les quatre même que nous désignons, l’usage est quelquefois double ou très-douteux, & tel mettra un accent grave où un autre place un aigu ; mais nous croyons pouvoir assûrer qu’on ne fera point de fautes bien sensibles, en suivant ce que nous avons marqué, & rapportant tous les e à ces quatre prononciations.

Nous voudrions bien pouvoir rendre ici justice à tous ceux qui ont contribué en quelque maniere que ce soit, à la perfection de ce Dictionnaire, & leur donner les éloges qu’ils méritent : mais outre qu’il y en a qui ne veulent point être nommés, le plus grand nombre ne nous est pas même connu. Parmi ceux qui le sont, nous ne pouvons nous dispenser d’apprendre au Public ce que la troisième Edition devoit à Mr. Moreau de Mautour, de l’Académie des Belles-Lettres ; & à Mr. de Jussieu, Docteur en Médecine de l’Académie des Sciences, & de la Société Royale d’Angleterre, Professeur de Botanique & Démonstrateur des Plantes au Jardin Royal : le premier l’avoit enrichie d’une quarantaine de remarques ou d’additions dignes d’un habile Académicien. Le second avoit revu une grande partie des articles qui concernent la Botanique ; & il eût continué jusqu’à la fin, si les voyages que feu S. A. R. Monseigneur le Duc d’Orleans, Régent du Royaume, lui ordonna de faire pour la perfection de la Botanique & l’ornement du Jardin Royal, ne l’en eussent détourné.

Il nous reste à parler des fautes qui pourront se trouver dans ce Dictionnaire. Quelque exactitude qu’on y ait apportée, on ne se flate point que dans six volumes aussi gros que ceux-ci, & d’une aussi longue haleine, chargées de tant de matieres différentes, il ne soit rien échapé qui ne soit juste & exactement vrai. Nous passons nous-mêmes condamnation par avance sur tout ce que l’on y découvrira de fautes bien prouvées : nous aurons une véritable & sincere obligation à quiconque voudra s’en donner la peine ; & en faveur du service qu’il rendra au Public, & dont les Editeurs futurs pourront profiter, & du plaisir qu’il nous fera à nous-mêmes de nous instruire, nous