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il signifie boire, s’enyvrer. Inebriari. Ce jeune homme étoit si bien abbreuvé, qu’il bronchoit à chaque pas.

Abbreuver, signifie figurément, instruire, prévenir quelqu’un par quelque chose, & l’en remplir. Imbuere. Il l’a abbreuvé de cette opinion. J’en suis abbreuvé dès ma jeunesse. Tout le monde est abbreuvé de cette nouvelle. Souvenez-vous de ces sources immortelles où vous vous êtes abbreuvez des saintes eaux de la Sagesse. Patru.

Abbreuvé, ée. part. pass. & adj. Imbutus.

Si-tôt que du Nectar la troupe est abbreuvée.

AbBREUVOIR. s. m. Lieu où on abbreuve les chevaux. Aquarium. Mener les chevaux à l’abbreuvoir. Il se dit plus précisément d’un glacis le plus souvent pavé de grais, & bordé de pierres, qui conduit à un bassin, ou à une rivière, pour abbreuver les chevaux. Dav. Il se dit aussi de l’endroit d’un ruisseau où les oiseaux vont boire. On prend des oiseaux à l’abbreuvoir, en y mettant grand nombre de petits gluaux. La vraie heure de tendre à l’abreuvoir est depuis deux heures du matin jusqu’au soir, demi-heure devant le soleil couché ; mais le meilleur tems c’est sur les dix heures jusqu’à onze, & depuis deux heures jusqu’à trois ; & enfin, une heure & demie devant le coucher du soleil, que les oiseaux viennent en foule à l’abbreuvoir. Chomel.

Abbreuvoir, en tèrmes de Maçonnerie, se dit des intèrvalles que les Maçons laissent entre les joints des pièrres, pour y faire entrer du mortier. En ce sens l’on se sèrt plus souvent du mot godet. Bima.. Les Anglois se servent du mot abbreuvoir dans ce même sens.

On dit provèrbialement d’une plaie large & sanglante, que c’est un abbreuvoir à mouches. Il lui a porté un coup à la tête, & lui a fait un grand abbreuvoir à mouches. Ablanc. On dit aussi qu’un bon cheval va bien tout seul à l’abbreuvoir, quand on se léve de table pour prendre soi-même à boire au buffet. Ces phrases sont du stile burlesque.

ABC.

A. B. C. on prononce abécé, s. m. Rudimentum. Alphabet de la Langue Françoise. C’est aussi un petit livre qui sert à apprendre à lire aux enfans. Cet enfant est encore à l’abécé.

ABCASSE. Voyez Abasse.

ABÉCÉ, signifie aussi le commencement d’une science, ou d’une affaire ; le principe d’un art. Prima Elementa. Quand on pense avoir pénétré les secrets de la nature, on se trouve encore à l’abécé. Renvoyer quelqu’un à l’abécé, c’est le traiter d’ignorant. C’est dans le même sens qu’on appelloit l’Empereur Justin αναλφάβεθη. Ce mot est composé des trois premières Lettres de l’alphabet François, comme le Grèc, qui lui répond, des deux premières. Alpha & Beta. Les Espagnols l’appellent Cartilla ; les Italiens Abaco, & les Anglois Abacus, qui vient du Grec άβακας, & s’est ainsi appellé, parce que pour commencer à apprendre les Lettres aux enfans, on les figuroit sur une tablette, ou sur une carte en forme de tablette, comme on fait encore dans les Écoles de Mathématiques pour les figures qu’il faut montrer aux Étudians. Ou bien il s’est formé des trois prémières Lettres de l’alphabet, comme le mot François Abécé.

ABÉCÉDAIRE. s. m. Qui est encore l’abécé. Elementarius. S. Jérôme & S. Fulgence, 3. Mythol. CX, disent Abecedarius, a, um. On se moque d’un vieillard abécédaire, qui est encore à l’abécé, qui ne sait rien. On a donné le titre d’Abécédaire à un livre de Pièrre d’Alva sur la Conception de la Vièrge en vingt-un volumes, dont la prémière lettre A contient trois gros vol. in-fol. imprimez à Madrid en 1648. Il est intitulé, Abecedarium Marianum. S. Augustin, dans ses retractations, Liv. I, Chap. XX. dit qu’on appeloit Abécédaires, Abecedarios, les Pseaumes dans lesquelles les prémières lettres de chaque strophe, ou quelquefois peut-être de chaque vèrs, suivoient l’ordre alphabétique. Dans l’Ecriture, le CXVIIIe Pseaume & les Lamentations de Jérémie sont de cette sorte ; par où il paroît que les Hébreux ont été les premiers Auteurs de cette espèce de Poësie, inventée apparemment pour aider la mémoire.


ABD.

ABDALLA, s. m. & nom propre. Quoique ce nom ne soit pas François, mais Arabe, comme on le trouve souvent dans des Histoires ou Rélations écrites en François, & qu’il vient de paroître encore tout récemment un Roman intitulé, les Avantures d’Abdalla, il ne sera pas inutile de dire ici ce qu’il signifie. Il est composé de deux mots Arabes, آباد, Abad, qui veut dire serviteur, celui qui honore, du vèrbe abada, adorer, honorer, sèrvir, & de Alla, Dieu ; ainsi Abdalla, c’est serviteur de Dieu.

ABDARA. Abdera, ae, ou Abdara. Nom d’une ancienne ville d’Espagne, dans la Bétique, sur la Côte de la Méditèrranée. Elle avoit


été bâtie par les Carthaginois. On la place ordinairement dans ce que nous appellons aujourd’hui le Royaume de Grenade, à peu près où est Adra, qui, peut-être, est Abdara même, dont le nom s’est corrompu.

ABDÈRE. Abdera, orum. Ancienne ville de Thrace. Plusieurs Savans croyent qu’elle fut bâtie par Abderus, ou bien par Hèrcule, en mémoire d’Abderus, qui avoit été déchiré par les chevaux de Dioméde. Leurs garents sont Philostrate, Etienne de Byzance, Scycmus de Chio, &c. Mais Solin & Méla disent qu’elle fut bâtie par Abdera sœur de Dioméde, qui lui donna son nom ; & sur les Médailles de cette ville, on lit d’un côté ΑΒΔΗΡΑΣ ΚΟΡΑΣ, avec la tête d’une Héroïne. Voyez M. Spanheim, p. 562. & suiv. Elle fut rebâtie par Timésius, qui y conduisit une Colonie de Clazoméniens ; & ensuite vers la 31e Olympiade, c’est-à-dire, environ 650. ans avant J. C. Les Téïens, peuples de l’Asie-mineure, ne pouvant souffrir la domination des Pèrses, passerent en Thrace, & s’établirent à Abdére. Quelques Auteurs veulent que ce soit Asperosa, ville maritime de Romanie. Elle a encore été nommée Astrizza.

ABDERITE. s. m. Abderites, Abderita. Qui est de la ville d’Abdére. Les Médailles de cette ville ont une tête rayonnée, avec ce mot ΑΒΔΗΡΙΤΕΩΝ. Les Abdérites étoient si stupides, que leur stupidité avoit passé en provèrbe, & qu’on disoit, Un esprit d’Abdére, Abderitica mens, pour, un esprit grossier, pesant, stupide. Cicéron ad Attic. viij. ep. 7. appelle un projet mal concerté, sans vûës, sans prudence, Un projet Abdéritique. Abdére néanmoins produisit de grands hommes, témoin Protagore & Démocrite.

ABDIAS, s. m. & nom propre. C’est le nom du quatrième des douze petits Prophètes, que les Protestans appellent communément Obadias, faisant passer la prononciation Hébraique dans les autres Langues : ce qui est, à mon sens, pécher contre le prémier principe des Langues, qui est l’usage. Car de quelque manière que l’on prononce un nom dans la Langue originaire de ce nom, il faut le prononcer comme il est établi par l’usage qu’on le prononce dans la Langue dans laquelle on parle, ou l’on écrit, & il n’y a pas moins d’absurdité à vouloir dire Obadias, Jeschejahu, Jechezchiel, &c. au lieu de Abdias, Isaïe, Ézéchiel, qu’il y en auroit à vouloir dire, Miriam, Jehoschua, Jehohhanan, Petrus, Alexandros, Julius Cæsar, Pompeius, Hyeronimus, Quintus-Curtius, &c. au lieu de Marie, Jésus, Jean, Pierre, Aléxandre, Jules César, Pompée, Jérôme, Quinte-Curce, &c. Aussi tous les Traducteurs François de l’Écriture, & ceux même de Genève ont dit Abdias. Au reste, ce nom vient de עבד abad, servir, honorer, & יה Ja, abrégé de Jehovah, nom de Dieu. Ainsi il signifie, serviteur de Dieu, ou de Jehovah.

ABDICATION, s. f. Démission, acte de renonciation à une Charge, à une Magistrature. Abdicatio. Il faut remarquer que l’abdication diffère de la résignation, en ce que l’abdication se fait purement & simplement, au lieu que la résignation se fait en faveur d’une tièrce pèrsonne.

On dit, L’abdication d’un fils rebelle & désobéïssant. Dans le Droit Civil l’abdication est opposée à l’adoption. L’abdication n’étoit différente de l’exhérédation que dans cette circonstance : c’est que le fils abdiqué étoit exclus de la famille & de la succession paternelle, par un acte public pendant la vie du père ; au lieu que l’exhérédation n’avoit d’exécution qu’en vèrtu de son testament. Les causes de l’abdication étoient les mêmes que celles de l’exhérédation. Harris, dans son Dictionnaire Anglois des Arts, dit qu’on trouve qu’abdication s’est dit encore d’un homme libre qui renonce à sa condition pour se faire esclave, ou d’un Citoyen Romain qui renonce à cette qualité & aux priviléges qui y étoient attachez.

On dit aussi au Palais, faire une abdication de biens, quand on en fait un abandonnement entier.

ABDIQUER, v. act. Renoncer à une Magistrature, à une Charge, s’en dépoüiller, l’abandonner. Abdicare. Dioclétien & Charles-Quint ont abdiqué l’Empire. Il se dit aussi absolument ; ce Prince à été forcé d’abdiquer.

On dit en Droit, Abdiquer un fils, pour dire, l’abandonner, le chasser de sa maison, ne le reconnoître plus pour fils. C’est l’exhéréder, & le priver de tous les avantages attachez à sa qualité de fils. Est quasi negare filium.

Abdiqué, ée, participe passif & adjectif. Abdicatus.

ABDOMEN, s. m. Tèrme de Médecine, qui signifie la partie extérieure du bas-ventre, depuis les cuisses en remontant jusqu’au diaphragme. Abdomen. C’est, dit Harris le plus bas des trois ventres du corps humain, appellé proprement le bas-ventre, qui comprend dans sa capacité le ventricule, les boyaux, le foie, la ratte, la vessie, &c. & qui est couvèrt en dedans d’une membrane, que l’on nomme Peritonœum ; sa partie inférieure Hypogastre, Hypogastrium : sa partie de devant est divisée


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