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AEU AFF AFF


te : la dernière sur-tout, c’est-à-dire, celle qui est la plus intérieure. Ces pierres sont dans leur origine molles, de la consistance & de la couleur de l’ocre jaune, & presque toujours à plusieurs couches.

AEU.

AEURER. Vieux mot, qui veut dire, Prier : il vient d’orare.

AFF.

AFFABILITÉ, s. f. Honnêteté avec laquelle un supérieur reçoit son inférieur, & se communique à lui. Abord doux & facile à l’égard de nos inférieurs qui ont à nous parler. Affabilitas. Ce mot vient du latin. Il se dit rarement d’égal à égal, & jamais d’inférieur à supérieur. L’affabilité des grands n’est qu’une vertu artificieuse, elle sert à leurs desseins & à leurs projets d’ambition. M. Esp. Jamais homme avec tant de grandeur, n’a allié tant d’affabilité à tant de douceur. Bourd. L’affabilité des personnes de qualité sans mérite, est une bassesse d’ame, & une incapacité de tenir leur rang. M. Esp. Heureux celui qui dans son affabilité naturelle trouve des dispositions favorables à la bénignité chrétienne. Le P. Gail. Patru avoit beaucoup d’antipathie pour affabilité : il est françois, disoit-il, mais laissons le dire aux autres.

AFFABLE. adj. m. & f. Affabilis. Ce mot vient du latin, & signifie, celui qui parle à ses inférieurs d’une manière douce, honnête, engageante, & qui les écoute de même, sans avoir rien dans ses regards, ni dans ses gestes, de rude ni de rebutant pour eux. Il commence un peu à vieillir : cependant il y a des gens de mérite qui s’en servent, & qui croient pouvoir lui redonner cours dans le bel usage.

Il est civil, accostable,
Doux, bénin, courtois, affable. Ménag.

Quoiqu’il fût occupé de grandes affaires, & de plus très affable & très-civil, il ne laissoit pas d’être toujours recueilli. Ab. Reg.

Lui, parmi ses transports, affable
& sans orgueil. Racin.

Cependant, quoique ce mot fut usité du temps de M. Patru, il avoit de la peine à le souffrir. Il, le laissoit dire aux autres, & ne s’en servoit jamais.

AFFABLEMENT. adv. D’une manière affable. Affabiliter, Humaniter. Il faut recevoir affablement les moindres personnes. Ce mot n’est presque plus en usage. Ceux qui écrivent poliment, préféreront toujours, Civilement, honnêtement, à affablement.

AFFADIR. v. act. Rendre fade & insipide, ôter toute sorte de saveur. Saporem detrahere. On a affadi cette viande en la faisant trop bouillir. Le sucre, le miel, affadissent le cœur. Si le sel est affadi, avec quoi assaisonnera-t-on ? dit le Sauveur en S. Matthieu.

Il se dit figurément en parlant des ouvrages d’esprit. Affadir un discours par des pensées & par des expressions affectées & doucereuses. On dit que de mauvaises louanges affadissent le cœur.

Affadi, ie, part. pass. & adj. Fatuus.

AFFAIRE. s. f. Ce qui peut occuper nos soins, nos pas, nos pensées, nous obliger à travailler, aller & venir. Negotium, Res. Il y a des gens toujours aussi occupés, que s’ils avoient mille affaires, quoiqu’ils n’en aient point d’autres que de savoir celles d’autrui. M. Scud. Pour faire l’homme occupé, & paroître accablé d’affaires, il faut froncer le sourcil, & réver à rien très-profondément. La Br. Plus le poids des affaires est grand, plus elles demandent de relâche. Le Gend. Notre grande affaire est celle de notre salut. Voilà une affaire, un cas de conscience. Il faut que chacun aille à son affaire, au travail qui lui est ordonné. Ne vous mettez pas en peine de cela, j’en fais mon affaire. Chacun se doit mêler de ses affaires. On dit aussi d’une chose que l’on regarde comme pénible, ou difficile à exécuter, que c’est une affaire : & au contraire, on dit d’une chose dont on croit venir facilement à bout, que ce n’est pas une affaire. Virgile a trouvé tant de rapports entre Didon & Enée,


qu’il a cru que les trois cents ans qui les séparoient, n’étoient pas une affaire. Cela ne fait rien à l’affaire ; pour dire, c’est un discours inutile. Du Cange derive ce mot de Affarium, ou Affare, qui signifioit autrefois une metairie ; & il dit qu’en Languedoc & en Provence il signifioit toutes sortes de biens. On a dit aussi Afferi & Affri pour signifier des chevaux de labour : ce qui a été etendu à toutes sortes de possessions, & ensuite au négoce & aux affaires qu’on est obligé d’avoir pour les acquérir ou pour les défendre. Au reste, ce mot affaire étoit autrefois masculin, c’est pourquoi l’on met encore sur les paquets du Roi, pour les exprès affaires de Sa Majesté. On a conservé le style & le genre ancien par dignité. Vaug. Il faut éviter les inventions humaines dans les affaires de Dieu, & se former autant que l’on peut sur l’exemple des Saints. Ab. de la Tr. c’est-à-dire, dans ce qui regarde le service de Dieu & notre salut.

Affaire, se dit aussi d’une chose, de quelque manière qu’elle soit. Je vous fais le maître de cette affaire, pour la terminer à votre volonté. C’est une affaire faite ; pour dire, c’est une chose finie. C’est une affaire qui ne souffre point de remise. C’est une étrange affaire qu’une Demoiselle. Mol. Le mariage est une affaire trop sérieuse pour lui. Vous avez pris l’affaire du biais qu’il la falloit prendre. Mol. Je viens d’apprendre de belles, d’étranges affaires. Il a poussé l’affaire d’une manière assez vigoureuse. Mol. Entreprendre vertement une affaire. Commencer courageusement une affaire. Terminer une affaire avec esprit & avec cœur. Il faut délibérer avec l’occasion, & en la présence des affaires.

Affaire, se dit des ordres, des soins, des négociations qui regardent l’Etat. Les grandes affaires demandent en ceux qui en ont le maniement, un jugement promt & décisif, de peur qu’elles ne se ruinent par la lenteur. S. Evr. Un honnête homme sait mêler les plaisirs aux affaires. S. Evr. La multitude, ni l’embarras des affaires, ne mirent jamais sur son front ces nuages de chagrins qui écartent les gens. P. Gail. Depuis qu’un tel Ministre a pris le timon des affaires, toutes choses vont bien. C’est un homme qui est entré dans les affaires, dans les négociations étrangères. Les affaires de Rome sont brouillées. C’est une affaire d’Etat, de Religion. On dit en ce sens : Les affaires du temps ; pour dire, les nouvelles de l’état des choses du monde. Il est toujours fort dangereux d’écrire des affaires de son temps, quand on affecte trop d’en dire la vérité.

Affaire, se dit aussi quelquefois de la fortune, de l’état des biens d’une personne. Maintenant que les affaires du genre humain sont déplorées, & sans ressource, mettons Caton en sûreté. Bouh. La plupart des gens ne se mêlent des affaires d’autrui, que pour mieux faire leurs propres affaires. S. Evr. Graces à Dieu, les affaires vont bien. Ce Bourgeois est fort bien dans ses affaires ; c’est-à-dire, qu’il a du bien, qu’il n’a point d’affaires mauvaises, ni embrouillées, que ses affaires sont en bon état.

Affaire, se dit proverbialement en ces phrases : Chacun sait ses affaires, ou du moins doit les savoir ; & absolument qu’un homme sait ses affaires, quand il conduit bien ses affaires avec prudence. On dit d’un homme que ses affaires sont faites ; pour dire qu’il est perdu, qu’il est ruiné, ou qu’il ne doit plus prétendre à quelque chose. On dit que les affaires font les hommes ; pour dire, qu’avec un médiocre génie on devient habile homme, quand il passe beaucoup d’affaires par les mains de quelqu’un. On dit qu’il n’est point de petite affaire ; pour dire, que le moindre ennemi peut donner beaucoup de peine. On dit, Dieu nous garde d’un homme qui n’a qu’une affaire ; parce qu’un homme qui n’a qu’une seule chose à faire, en est ordinairement si occupé, qu’il en fatigue tout le monde. On dit avoir affaire à la veuve & aux héritiers ; pour dire, qu’on ne manque pas d’occupation. On dit aussi avoir affaire à forte partie ; pour dire, qu’on n’a rien à négliger, & que l’on sera bien heureux si l’on se tire d’embarras. On dit, que ceux qui n’ont point d’affaires s’en font ; pour dire, que les hommes sont inquiets, & se lassent d’être oisifs & sans agir. On dit, à demain les affaires ; pour dire, qu’on ne veut songer alors qu’à se divertir. On dit ironiquement, qu’un homme a fait une belle affaire, pour dire, qu’il s’est trompé, qu’elle est ruineuse. C’est une autre affaire, c’est une affaire à part ; pour dire, qu’il ne faut pas


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