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dant toute sa jeunesse, et quelle puissante action pourrait exercer une jeune fille belle et aimée ! — Comme épouse, elle a action sur lui les trois quarts de sa vie. — Enfin comme fille, elle a action sur lui dans sa vieillesse. — Remarquez que la position de l’ouvrier est tout autre que celle de l’oisif. — Si l’enfant du riche a une mère incapable de l’élever, on le met en pension ou on lui donne une gouvernante. — Si le jeune homme riche n’a pas de maîtresse, il peut occuper son cœur et son imagination par l’étude des beaux-arts ou de la science. — Si l’homme riche n’a point d’épouse, il ne manque pas de rencontrer des distractions dans le monde. — Si le vieillard riche n’a pas de fille, il trouve quelques vieux amis ou jeunes neveux qui consentent très volontiers à venir faire sa partie de boston, tandis que l’ouvrier, auquel tous ces plaisirs sont interdits, n’a pour toute joie, pour toute consolation, que la société des femmes de

    parler de l’organisation des écoles primaires pour les filles. N’est-il pas étrange qu’un pays comme la France, qui se regarde comme à la tête de la civilisation, qui cherche à le prouver en répandant sur toutes les classes de citoyens les lumières de l’instruction, qui ouvre partout des écoles pour les enfants et des écoles pour leurs maîtres, néglige aussi complétement d’instruire les femmes, ces premiers instituteurs de l’enfance ? Cet oubli n’est pas seulement une injustice, c’est une imprudence, c’est une faute. Que résulte-t-il en effet, de l’ignorance de la plupart des mères de famille ? Que lorsqu’à cinq ans leurs fils arrivent à l’école, ils apportent une foule de dispositions mauvaises, de croyances absurdes, d’idées fausses, qu’ils ont sucées avec leur lait ; et le maître a plus de peine à les leur faire oublier, à les détruire dans leur esprit, qu’à leur apprendre à lire. C’est donc, en définitive plus de temps et d’argent qu’il en coûte, pour consommer une injustice et avoir de mauvais élèves, que pour donner de l’instruction aux femmes, et en faire en même temps des ouvrières plus habiles, des ménagères plus utiles, et des répétiteurs naturels et gratuits des leçons de l’école. »