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2 millions d’ouvrières[1]. Que ces 7 millions d’ouvriers s’unissent par la pensée et l’action en vue d’une grande œuvre commune, au profit de tous et de toutes : que chacun donné pour cela 2 fr. par an, et au bout d’une année L’UNION OUVRIÈRE possédera la somme énorme de quatorze millions.

Vous allez me dire : — Mais comment nous unir pour cette grande œuvre ?… Par position et rivalité de métiers nous sommes tous dispersés, souvent même ennemis et en guerre les uns contre les autres. — Puis 2 fr. de cotisation par an, c’est beaucoup pour de pauvres journaliers !

À ces deux objections je répondrai : — Que s’unir pour la réalisation d’une grande œuvre, ce n’est pas s’associer. Les soldats et marins qui, par une retenue sur leur solde, contribuent, chacun pour une part égale, dans le fonds commun qui sert à entretenir 3 000 soldats où marins à l’Hôtel des Invalides, ne sont pas, pour cela, associés entre eux. Ils n’ont besoin, ni de se connaître, ni de sympathiser d’opinions, de goûts et de caractères. Il leur suffit de savoir que tous les militaires ; d’un bout de la France à l’autre, versent la même cotisation : ce qui assure aux blessés, aux infirmes et aux vieillards, leur entrée de droit à l’Hôtel des Invalides.

Quant à la somme ; je le demande, quel est celui des ouvriers, même parmi les plus pauvres, qui ne pourra pas, en économisant un peu, trouver, dans le cours d’une année, 2 fr. de cotisation, afin de s’assurer une retraite pour ses vieux jours[2] ? — Eh quoi ! vos voisins, les malheureux Irlandais, le peuple le plus pauvre de toute la terre, le peuple qui ne mange que des pommes de terre, et n’en mange que de deux jours l’un[3] !… un

  1. Voir, pour l’exactitude de ces chiffres, les ouvrages des statisticiens, et le remarquable travail de M. Pierre Leroux, de la Ploutocratie.
  2. Cela ne fait que 17 centimes par mois.
  3. L’Irlandais ne mange de viande qu’une fois l’an, le jour de Noël, Tous, étant pauvres, n’emploient pour se nourrir que l’aliment