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l’aumône, car la mendicité est défendue par la loi. — Cette situation précaire vous plonge dans l’état sauvage où l’homme, habitant des forêts, est obligé chaque matin de songer au moyen de se procurer la nourriture de la journée. — Une semblable existence est un véritable supplice. Le sort de l’animal qui rumine dans l’étable est mille fois préférable au vôtre ; il est sûr, lui, de manger le lendemain ; son maître lui garde dans la grange, de la paille et du foin pour l’hiver. Le sort de l’abeille, dans son trou d’arbre, est mille fois préférable au vôtre. Le sort de la fourmi, qui travaille en été pour vivre tranquille en hiver, est mille fois préférable au vôtre. — Ouvriers, vous êtes malheureux, oui, sans doute ; mais, d’où vient la principale cause de vos maux ?… Si une abeille et une fourmi, au lieu de travailler de concert avec les autres abeilles et fourmis à approvisionner la demeure commune pour l’hiver, s’avisaient de se séparer et de vouloir travailler seules, elles aussi mourraient de froid et de faim dans leur coin solitaire. Pourquoi donc restez-vous dans l’isolement ?… — Isolés, vous êtes faibles et tombez accablés sous le poids des misères de toutes sortes ! — Eh bien ! sortez de votre isolement : unissez-vous ! — L’union fait la force. Vous avez pour vous le nombre, et le nombre, c’est beaucoup.

Je viens vous proposer une union générale entre les ouvriers et ouvrières, sans distinction de métiers, habitant le même royaume ; union qui aurait pour but de CONSTITUER LA CLASSE OUVRIÈRE et d’élever plusieurs établissements (Palais de l’UNION OUVRIÈRE) ; répartis également dans toute la France. Là, seraient élevés des enfants des deux sexes, de six à dix-huit ans, et on y recevrait les ouvriers infirmes ou blessés et les vieillards[1]. Écoutez parler les chiffres, et vous aurez une idée de ce qu’on peut faire avec l’UNION.

Il y a en France environ 5 millions d’ouvriers et

  1. Voir le chapitre IV. Comment on procédera aux admissions.