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Bien qu’accablée par le nombre elle est si forte, qu’elle survit à la destruction de 93, et vingt ans après elle rentre en France, son roi à sa tête ! — Et en face de pareils résultats vous vous obstineriez à rester dans votre isolement ! Non, non, vous ne le pouvez plus sans faire acte de démence.

En 89 la classe bourgeoise a conquis son indépendance. Sa charte, à elle, date de la prise de la Bastille. — Ouvriers, pendant deux cents ans et plus, les bourgeois ont combattu avec courage et acharnement contre les priviléges de la noblesse et pour le triomphe de leurs droits[1]. — Mais le jour de la victoire venu, bien qu’ils reconnussent pour tous l’égalité des droits, de fait, ils accaparèrent pour eux seuls tous les bénéfices et avantages de cette conquête.

Depuis 89 la classe bourgeoise EST CONSTITUÉE. — Remarquez quelle force peut avoir un corps uni par les mêmes intérêts. — Dès l’instant où cette classe EST CONSTITUÉE, elle devient si puissante qu’elle peut s’emparer exclusivement de tous les pouvoirs du pays. — Enfin en 1830 sa puissance arrive à son apogée, et sans se mettre en peine des suites, elle prononce la déchéance du dernier roi de France ; — elle se choisit un roi à elle, procède à son élection sans prendre conseil du reste de la nation, et enfin, étant de fait souveraine, elle se place à la tête des affaires et gouverne le pays à sa guise.

Cette classe bourgeoise-propriétaire se représente elle-même à la Chambre et devant la nation, non pour y défendre ses intérêts, car personne ne les menace, mais pour imposer aux 25 millions de prolétaires, ses

  1. À la vérité, si les bourgeois étaient la tête, ils avaient pour bras le peuple, dont ils savaient se servir habilement. — Quant à vous, prolétaires, vous n’avez personne pour vous aider, — il faut donc que vous soyez à la fois la tête et le bras.