Page:Trolliet - La Route fraternelle, 1900.djvu/102

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Toi qui viens du sillon, dépose ta colère,
Toi, le rustre farouche et le loup séculaire,
Au civique banquet entre comme un lion…
Mais un lion qui fait aux autres place à table,
Et déchire d’abord de sa griffe équitable
Au code du passé la loi du talion.

Toi qu’au pied des autels a pris le statuaire,
Tu laissas la terreur au fond du sanctuaire,
Et tes deux bras levés et ton front radieux
Ne prophétisent plus que l’ère de concorde ;
Et ta bouche a jeté ce cri : Miséricorde !
Répété par la terre, exaucé par les cieux.

Et tous les trois, égaux par l’âme et dans l’échange,
Et pareils aux aïeux, pacifique phalange,
Qui prodiguant leurs bras et leurs jours par milliers
Bâtissaient la chrétienne et vaste basilique,
Édifiez ce temple aussi : la République,
Et de sa large nef soyez les trois piliers ;

Ou soyez les guetteurs sur la tour de la ville,
Observant, par-dessus la montagne immobile,
Le grand livre du ciel aux syllabes de feu,
Qui, depuis six mille ans, à tous les astronomes,
N’a jamais dit qu’un mot : « Fraternité des hommes
Sous la paternité de Dieu. »