Page:Trollope - La Pupille.djvu/102

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dans l’ignorance de l’avenir, reprit le major en souriant, et je vois que sir Charles était aussi dans le même cas que moi.

— J’aurais cru plus facilement à la prédilection de mon noble ami pour M. Wylkins qu’à son aveuglement en faveur de miss Martin, et je dois convenir que l’habileté et les moyens de séduction de notre pupille m’inspirent une profonde admiration, » dit sir Charles d’un ton suffisamment ironique. Puis il ajouta : « Maintenant il faudrait décider si la jeune héritière vivra chez vous comme par le passé, et dans ce cas les revenus de sa propriété s’accumuleraient jusqu’à sa majorité ; ou si elle ira vivre avec vous et votre chère famille dans sa charmante habitation, dont elle aurait alors la pleine et entière jouissance.

— Ce dernier projet me paraîtrait préférable, mais je n’admettrais pas l’idée que mes enfants s’habituassent à vivre dans cette élégante propriété, que nous serons un jour obligés de quitter ; qu’en dis-tu, Poppsy ?

— Je ne voudrais pas vous empêcher de remplir vos devoirs de tuteur, mon ami ; mais je n’aimerais pas à quitter mon modeste intérieur pour aller habiter un palais dont la pauvre Sophie serait la maîtresse.

— La pauvre Sophie ! Tâchez donc, maman, de trouver une épithète plus en rapport avec la noble personne à laquelle vous l’appliquez, s’écria Algernon.

— Je l’appelle pauvre, mon fils, parce que personne ne paraît l’aimer.

— Ah ! si vous ne demandez que des semblants d’affection, elle en aura maintenant ; c’est une tendresse sérieuse qu’elle ne mérite pas et qu’elle ne trouvera jamais.

— Assez là-dessus, Algernon ; on croirait, à votre acrimonie, que vous êtes jaloux de la fortune de votre cousine.