Page:Trollope - La Pupille.djvu/126

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qu’elle n’a pas voulu m’emprunter quelques guinées. Ne suis-je pas un bien aimable tuteur ?

— Si c’est là-dessus que vous désirez être grondé, mon ami, ne vous adressez pas à moi, car je n’ai jamais, je crois, rencontré une créature que je déteste autant que miss Martin Thorpe, comme l’appelle le charmant baronnet. Quelle vilaine petite personne, méchante, rapace et ingrate au dernier point !

— Elle ! répondit le major avec mécontentement. En prenant la pauvre orpheline chez nous, nous n’avons jamais pensé à en être payés, pas plus avec de l’argent que par de la tendresse et de la reconnaissance.

— Certes, vous avez raison, mon ami, répondit mistress Heathcote ; mais rien ne peut excuser la manière impertinente dont elle nous traite : on dirait d’une duchesse égarée chez des gens de rien et de chez lesquels elle veut sortir à n’importe quel prix.

— Je ne vous demande pas cela, répondit le major en souriant avec amertume ; seulement je vous avoue que j’ai plus peur, maintenant que sa garde m’est confiée par son oncle mourant, que lorsque j’étais à Bruxelles et que nous marchions sur Waterloo. À mon sens, je deviens fou ou imbécile.

— J’éprouve absolument la même impression que vous, cher major, et à tout ce qu’elle dit ou fait je voudrais chercher querelle à votre pupille, que j’aime moins que jamais depuis tous ces nouveaux arrangements, surtout depuis le départ d’Algernon et de nos petites filles.

— Je suis charmé de vous avoir ouvert mon cœur, Poppsy : car, n’importe ce que nous aurons à supporter, d’un seul regard nous pourrons nous comprendre ! Nous n’aurons pas besoin de parler, ce qui est toujours imprudent devant les enfants. Prenons sur nous cependant, ma bonne amie, de ne pas chercher le mauvais côté de ses actions, tout en nous appliquant à l’empêcher de mal