Page:Trollope - La Pupille.djvu/40

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Martin à cette sale créature qui est là sur le canapé. Voilà justement cette sorte de filles que je ne puis souffrir. »

Pendant ce temps, Sophie feuilletait des livres de musique, tandis que Florence causait avec sa belle-mère et qu’Algernon était allé voir ce qui se passait au dehors. Tout à coup Sophie, ayant trouvé de la musique italienne, l’apporta à miss Wilkyns en disant : « Voici, chère cousine Elfreda. Ah ! laissez-moi vous donner ce joli nom… Voici un air italien qui vous plaira peut-être.

— Ma chère enfant, c’est d’un vieux effroyable. Cette ancienne musique me déplaît étrangement et va jusqu’à me rendre malade ; cependant, ma petite Sophie, vous êtes si gentille, que je ferais tout pour vous plaire ; et même je vous permets de m’appeler Elfreda. Mais sachez d’abord que c’est un nom très-important, chez les Wilkyns ; car la terre de Carrgwynnmorris, dont j’hériterai après la mort de mon père, a été apportée en dot dans la famille par une Elfreda.

— Je gagerais qu’il n’y a pas un chant de Catamari, dans tout ceci, s’écria, après une assez longue recherche, miss Eldruda Wilkyns.

— Mais ne pouvez-vous chanter de mémoire ? demanda Sophie.

— Oh ! j’espère le pouvoir ; mais j’aime à avoir ma musique sur le pupitre quand je chante ; cela donne une contenance, et c’est beaucoup de savoir où fixer son regard. Les hommes maintenant sont tellement fats que, si par hasard, en chantant, les yeux s’arrêtent un instant sur eux, ils sont convaincus qu’on les adore et que l’on est prête à leur donner sa main et sa fortune.

— Vraiment ! cousine Elfreda, murmura Sophie, affectant de paraître à la fois étonnée et choquée de ce qu’elle entendait. Oh ! comme vous devez haïr les hommes !