Page:Trollope - La Pupille.djvu/41

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— Oh ! certes, je les méprise, ma chère, et je n’épouserai jamais qu’un homme digne de moi.

— Oh ! mais vous êtes sublime, Elfreda, s’écria Sophie avec enthousiasme ; combien je suis heureuse d’être venue ici ! Quand je pense que je m’y refusais ! il me paraissait si ridicule qu’une créature aussi nulle que je le suis se montrât auprès des personnes que je savais y rencontrer ! Oh ! Elfreda, laissez-moi vous aimer !

— Oui, ma chère, je vous le permets, parce que vous êtes gentille et qu’il n’y a aucune vulgarité en vous. Oh ! d’abord, la distinction est obligatoire chez les amies des Wilkyns. »

En ce moment Algernon, qui avait examiné les frères Spencer et regardé les salles du bas de la maison, rentra au salon ; mais pendant son absence sa sœur Florence, vaincue par la fatigue et le sommeil, s’était endormie sur le sofa, et sa bonne mère, après avoir posé ses jolis petits pieds sur un canapé de satin vert, les avait recouverts de son écharpe de soie noire, afin, pensait-elle que l’enfant se reposât chaudement de cette journée de fatigue. Au moment où la porte s’ouvrit, l’excellente dame éprouva une vive anxiété par rapport au sofa de satin, qui n’était pas fait pour supporter des pieds même aussi jolis que ceux de Florence ; mais son inquiétude cessa bientôt à la vue d’Algernon : sur un signe de sa belle-mère, le jeune Heathcote s’approcha doucement et se tint debout derrière elle.

« Allons-nous avoir de la musique ? demanda-t-il.

— Je le suppose ; j’espère qu’elles ne feront pas trop de bruit, pour ne pas réveiller cette pauvre enfant. Je n’ai jamais vu une personne plus fatiguée que Florence aujourd’hui. S’il se pouvait faire qu’elle fût laide, je dirais presque qu’elle l’est ce soir, et j’ai été bien contrariée de voir que personne ne faisait attention à elle.