Page:Trollope - La Pupille.djvu/52

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qui avaient reçu des leçons d’un professeur venant une fois la semaine de Swansea. Néanmoins sir Charles les aurait évidemment louées et remerciées, s’il n’avait cru entendre la voix de mistress Heathcote lui adresser la parole.

« Que disiez-vous, madame ? demanda-t-il en se dirigeant vers le canapé sur lequel mistress Heathcote et Florence étaient encore assises.

— Rien, monsieur, je ne vous ai pas parlé.

— Vraiment, je l’avais cru. Votre fils s’est donc retiré, madame ? Il devait être très-fatigué.

— Il n’est guère fort, le pauvre enfant ; mais Florence, qui ferait douze milles à pied sans être fatiguée, est aujourd’hui anéantie.

— Mademoiselle aime-t-elle la musique ?

— Elle l’aime comme les oiseaux qui chantent du matin au soir. »

Ici Florence, qui n’aimait pas que l’on parlât d’elle, se leva et alla regarder le whist.

« Est-ce que Mlle Florence chante ? demanda sir Charles en contemplant avec complaisance la gracieuse démarche de la jeune fille qui s’en allait.

— Oh ! mais oui ; je suis peut-être partiale, mais à mon idée elle a la plus jolie voix que j’aie jamais entendue.

— Comment alors avez-vous été assez cruelle pour ne pas la prier de se faire entendre ce soir ?

— Grand Dieu, je n’aurais jamais pensé à pareille chose. Je ne dis pas qu’elle soit une exécutante comme ces belles demoiselles : car le major n’aurait pu lui faire donner des leçons, malgré son vif désir d’apprendre. Et quand même nous aurions pu payer des professeurs, ils n’auraient jamais pu rendre, à notre idée, sa voix plus douce et plus suave, et du reste, aux Clevelands, il n’y a que nous pour l’écouter.