Page:Trollope - Le Domaine de Belton.djvu/206

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ses ancêtres. Il se sentait justement fier de sa position : « Et pourtant, se disait-il, j’ai acquis tout cela par un triste hasard ; l’homme qui fait sa position lui-même a seul le droit d’en être fier. » Il repassait ensuite dans son esprit les événements de la dernière année : son arrivée au château, sa soudaine résolution de faire de Clara sa femme, ses courtes espérances et son amer chagrin en apprenant que sa cousine devait épouser le capitaine Aylmer. Mais maintenant cette barrière détestée n’existait plus entre eux : Clara était libre, libre de donner sa main à celui qui obtiendrait son cœur. Will pouvait, sans l’offenser, renouveler ses instances, et Mary lui conseillait d’attendre. Fallait-il laisser un nouveau capitaine Aylmer venir lui donner de nouveaux soucis ? Non, il n’attendrait pas, il reverrait sa cousine le soir même.

« Mary, dit-il en rentrant, j’irai au cottage après dîner.

— Avez-vous un rendez-vous ?

— Non, je n’ai pas de rendez-vous. En est-il besoin pour aller voir sa cousine à la campagne ?

— Je ne connais pas les habitudes de la maison.

— Je n’entrerai pas, mais j’ai besoin de la voir. »

Sa sœur le regarda avec ses grands yeux tendres et mélancoliques. Elle l’aimait tant, qu’elle eût donné sa main droite pour lui obtenir ce qu’il désirait. Mais elle s’affligeait de le lui voir désirer si