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Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/312

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ler de Caroline. En causant avec elle, il ne dissimula pas son profond mécontentement. Il écrivait d’aimables et spirituelles lettres à sa future, et en même temps il disait sur son compte à Adela les choses les plus dures, — des choses d’autant plus dures qu’elles étaient vraies.

— Je m’étais dévoué à elle, disait-il ; je travaillais pour elle comme un forçat, et je m’en estimais heureux. J’aurais tout risqué, tout souffert, tout supporté si elle avait consenti à partager ma vie. Tout ce que je possède aurait été employé à la mettre à l’abri de la gêne. Je l’aime encore, Adela ; c’est peut-être là mon malheur. Mais jamais plus je ne pourrai l’aimer comme je l’aurais aimée si elle était venue à moi tout d’abord.

— Comment travailler maintenant ? disait-il encore. Je serai reçu avocat, cela va sans dire, c’est la chose du monde la plus simple ; il est possible que je gagne alors de quoi nous faire vivre d’une façon convenable. Mais l’ardeur, la noble ardeur qui me soutenait a disparu. Elle préfère qu’il en soit ainsi. Elle est intolérante vis-à-vis de l’enthousiasme. N’est-il point malheureux, Adela, que nos caractères soient si différents ?

Que pouvait lui répondre Adela ? Chacune des paroles de Bertram lui semblait une vérité, une triste et accablante vérité, une répétition de cette vérité qui lui rongeait le cœur. Elle éprouvait pour lui une entière et cordiale sympathie. Elle ne blâmait pas positivement Caroline ; mais elle admettait, et admettait même très-volontiers que, selon elle, Caroline avait tort.