Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour Caroline, et dit qu’elle a le droit de se plaindre. Mais je ne saurais blâmer George, quant à moi, en conscience, je ne le puis.

— C’est un de ces cas dans lesquels on ne doit jeter le blâme à personne.

— Précisément ; c’est ce que je dis. Voici le conseil que j’ai donné à George. Il ne faut pas que les idées d’intérêt influent sur ta conduite en aucune façon. Dieu merci ! il y a assez d’argent pour nous tous. La seule chose à laquelle tu doives penser, c’est à votre bonheur à tous deux. Voilà ce que je lui disais, et je crois vraiment qu’il a agi d’après mes avis. Je ne crois pas qu’il ait eu la moindre arrière-pensée sordide au sujet de la fortune de Caroline.

— J’en suis parfaitement convaincue.

— Pas la moindre. Quant aux idées de sir Henry, je ne prétends pas les connaître. On dit ici qu’il cherche depuis quelque temps à gagner les bonnes grâces de mon frère. Libre à lui. Je suis vieux, mademoiselle Gauntlet, — assez vieux pour être votre père (le ci-devant jeune homme aurait pu dire grand-père, s’il l’eût voulu), et voici ce que mon expérience m’a enseigné : l’argent ne vaut pas l’a peine qu’on se donne pour l’obtenir. On dit que mon frère aime l’argent : si c’est vrai, je crois qu’il se laisse aller là à une grande erreur, — une bien grande erreur.

C’étaient de beaux sentiments ; mais, même pour l’oreille inexpérimentée d’Adela, il n’y avait pas là le son du vrai et pur métal. À vrai dire, la fausse vertu n’en impose qu’à bien peu de gens. On reconnaît fort