Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/256

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cours il parviendrait à obtenir de l’or, de l’or aussi vil que lui ? Lui devait-on quelque chose à cet homme ? Ah ! que dirait le monde, si elle partait avec celui qu’elle aimait ?

— Caroline, dit-il tout bas à son oreille, Caroline, chère Caroline !

Il murmurait ainsi de douces paroles, tandis que sa main reposait encore, bien légèrement, mais tendrement sur l’épaule de Caroline. Elle ne répondait rien, mais il entendait le bruit confus et étouffé de ses sanglots. — Caroline, répéta-t-il, chère, bien chère Caroline. Et il s’agenouilla à côté d’elle, et la main qui s’était posée sur l’épaule pressa le bras de Caroline.

— Parlez-moi, Caroline, dites-moi quelque chose. Je m’en irai si vous l’ordonnez. Oui, je partirai seul. Je m’en irai tout seul si vous avez le courage de me l’ordonner. Parlez, Caroline.

— Que voulez-vous que je dise ? Elle releva la tête et le regarda enfin à travers ses larmes, mais avec un air si changé, si hagard, si égaré, qu’il eut peur de l’expression de ce visage. — Que voulez-vous que je dise ? Que voulez vous que je fasse.

— Je serai votre esclave, si vous y consentez, dit-il.

— Non, George ; c’est moi qui serais votre esclave… pendant un peu de temps, jusqu’à ce que vous me jugiez trop vile même pour ce rôle-là.

— Hélas ! que vous me connaissez mal !

— Je vous connaîtrais bien mal, en effet, si je pensais que vous pourriez m’estimer, étant tombée si bas. Non, la miséricorde de Dieu ne m’a point abandonnée.