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Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/265

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— Non, sir Henry, non. Je l’ai trahi, lui ; j’ai trahi les devoirs de mon sexe ; j’ai trahi surtout les sentiments de mon cœur ; mais vous, je ne vous ai point trahi.

— Vous avez été oublieuse de mon honneur.

— J’ai su du moins me rappeler le mien.

Ils étaient face à face, et, comme elle disait ces derniers mots, une pensée traversa l’esprit de sir Henry. Il se dit qu’il serait peut-être sage de feindre d’y voir un indice de repentir et d’en faire un point de départ pour accorder un pardon partiel nécessaire à ses projets.

— Vous vous êtes oubliée, Caroline…

— Arrêtez, sir Henry, et laissez-moi parler, puisque vous n’avez pas voulu me permettre de me taire. Je ne vous ai jamais trompé, vous dis-je, et, avec l’aide de Dieu, je ne vous tromperai jamais…

— C’est bon ! c’est bon !

— Attendez, monsieur, et laissez-moi finir. Je vous ai souvent dit que je ne vous aimais pas. Je vous le dis de nouveau. Je ne vous ai jamais aimé, et jamais je ne vous aimerai. Vous m’avez appelée d’un nom infâme, et par cela même que j’ai vécu avec vous, sans vous aimer, je n’ose pas dire que vous m’avez calomniée. Mais je ne pécherai plus.

— Que voulez-vous dire ?

— Je ne mériterai plus cette épithète — même de vous.

— Quelle folie ! Je ne vous comprends pas. Vous ne savez ce que vous dites.