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Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/292

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— Penses-tu qu’Adela aime réellement quelqu’un répéta Arthur.

— Je te le dirai si tu veux répondre à ceci : Es-tu, toi-même, amoureux ?

De nouveau Arthur rougit jusqu’aux oreilles. Il voulait bien parler d’Adela, mais non de lui-même.

— Amoureux, moi, dit-il enfin. Tu sais bien que j’ai dû renoncer à toute idée de ce genre. Dans la position où je me suis trouvé je n’ai pu songer à me marier.

— Mais cela n’empêche pas de tomber amoureux.

— Tu crois ? dit Arthur avec une parfaite innocence.

— Cela ne m’a pas préservé — ni toi non plus, à ce que je crois. Allons, Arthur, sois franc, — si tant est qu’un homme qui a trente-neuf articles de religion pendus au cou puisse être franc. Dis une bonne fois la vérité. Es-tu amoureux d’Adela, oui ou non ?

Mais la vérité n’était pas si facile à dire. Était-ce la faute des trente-neuf articles, ou celle de la modestie naturelle de son caractère ? Je n’oserais le décider ; toujours est-il qu’Arthur ne se sentit pas la force de donner une réponse directe à la question si catégorique de son cousin. Il n’aurait pas demandé mieux que de voir Bertram en possession de toute la vérité, mais il n’avait pas le courage de la lui dire.

— Si tu l’aimes, et que tu ne le lui déclares pas, reprit Bertram, après avoir attendu inutilement une réponse, je dirai que tu es… Mais non ! chacun doit rester juge de sa propre conduite en pareille matière,