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Page:Tsubouchi - Ourashima.djvu/19

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il ouvre le coffret, et la fumée odorante qui s’en échappe monte en s’enroulant vers le ciel. Alors, tournant sa face vers l’Île bienheureuse d’où lui parvient comme une voix affaiblie, il sanglote ce dernier adieu : « En soupirant vers toi, ô ma bien-aimée, à l’aurore du jour, je me tiens sous ma porte, et j’écoute les vagues qui se brisent sur les rivages du Pays éternel ! »

Ici encore, l’écrivain nourri aux lettres chinoises montre souvent le bout de l’oreille ; mais si maints détails sont empruntés, le thème fondamental demeure toujours le même, et, comme dans le Manyôshou, il est traité d’une manière bien japonaise, avec une mélancolie gracieuse qui ne doit rien aux influences du continent. Plus tard, dans un de ces drames lyriques où devait se condenser le plus pur de la poésie nationale, on représentera l’auguste visite d’un envoyé impérial au temple de Midzounoyé, où maintenant Ourashima est adoré comme un dieu ; et on verra se révéler au messager du mikado, après Ourashima lui-même, le roi des dragons marins, la tortue aux cinq couleurs et la divine épousée du Mont Hôraï ; mais, au-dessus de toutes ces réminiscences, on sentira flotter, dans les vers de rêve qui font l’enchantement des Nô, l’âme délicate du vieux Japon qui conçut l’idée intime de cette légende.

Ailleurs, c’est encore l’esprit japonais qui inventera de nouvelles variantes. Dans un précieux rouleau que