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Tortue sacrée, qui lui donnera encore dix mille années de bonheur.

Nous arrivons ainsi à l’œuvre où ce symbolisme devait trouver son plein épanouissement : la légende dramatique de M. Tsoubooutchi Youzô. Par ce qui précède, le lecteur est maintenant préparé à la comprendre ; et en la comparant aux essais d’où elle sortit, il saura bien en mesurer la valeur. Quel chemin parcouru, à travers douze siècles d’évolution littéraire, depuis la brève anecdote du Nihonghi jusqu’à cette œuvre d’art ! M. Tsoubooutchi, en pur lettré, a bien senti qu’on ne saurait imaginer le théâtre sous une forme plus exquise que celle des anciens Nô. Il a suivi la tradition des vieux maîtres, conservé leur esprit, versé à pleines mains dans son creuset tous les joyaux de la poésie nationale. Mais, en restant ainsi fidèle au génie natif, il a cependant montré avec éclat l’originalité de sa pensée personnelle. À l’antique légende indigène et à ses enjolivements chinois, il a su ajouter un élément nouveau : l’idéal d’une harmonieuse réconciliation entre l’âme orientale et l’âme de notre Europe. C’est le sens caché de cette féerie, où le Japon même semble emprunter la voix d’Ourashima lorsqu’il chante ces vers de la dernière scène : « Où s’en est-elle allée, ma jeunesse ?… Elle a disparu comme un nuage, et maintenant me voilà un vieillard… Mais je ne renierai pas mon passé ! »

Il serait à souhaiter que cette belle œuvre, désormais