Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/534

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Revenons donc à demander directement au propriétaire, et à lui demander en argent, la part de son revenu dont l’État a besoin.

Que lui demandera-t-on ? Comment le lui demandera-t-on ?

Deux systèmes différents.

Demander à chacun une portion de revenu, une quotité fixe, c’est le système du dixième, du vingtième ; c’est celui qu’on propose dans la Théorie de l’impôt, dans la Philosophie rurale ; c’est celui de l’impôt territorial en Angleterre.

On peut demander au contraire une somme fixe à la nation, à chaque province, à chaque communauté : cette somme fixe se répartit sur tous les propriétaires à raison de leur propriété.

Ce second système, forcé dans la taille arbitraire, a été aussi adopté dans les pays de cadastre ou de taille réelle. Ce n’est même qu’à ce système qu’est véritablement approprié le cadastre. Car à quoi sert un cadastre immuable, lorsqu’on demande une partie proportionnelle d’un revenu qui varie ? mais quand on fait une répartition, il faut un tableau fixe. Il n’y a en tout que quatre systèmes possibles sur la répartition de l’imposition territoriale.

1o Celui d’une partie proportionnelle des fruits ; c’est celui de la dîme, dont j’ai déjà parlé et dont j’ai assez développé les avantages et les inconvénients.

2o Celui d’une partie proportionnelle du revenu ; c’est celui des vingtièmes.

3o Celui d’une somme fixe répartie chaque année entre les contribuables, d’après la connaissance qu’ils ont entre eux des produits ; c’est à peu près le système de la taille arbitraire bornée au fonds.

4o Celui d’une somme fixe, répartie d’après une évaluation invariable des héritages ; c’est le système du cadastre ou de la taille réelle.

Le système de la part proportionnelle du revenu aurait de grands avantages.

Une loi immuable pourrait terminer à jamais toutes les disputes entre le gouvernement et le peuple, surtout en fixant une quotité pour la guerre et une pour la paix. On s’arrangerait sur ce pied dans les achats et les ventes, et l’on n’achèterait pas plus la part

    tenté de le croire ; car, dès 1716, des écrivains, qui n’étaient pas hostiles au clergé, portaient la dîme à 154 millions, et le revenu des biens de l’Église, non compris ceux des pays conquis, à une somme au moins égale. Pour notre compte, nous estimons qu’il y a erreur d’au moins moitié dans le chiffre de Dupont de Nemours. (Voyez Économistes financiers du dix-huitième siècle, page 19, note 2.) (E. D.)