Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/97

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science financière, simple combinaison du vol avec les absurdes pratiques de la vieille fiscalité[1], n’avait abouti, et cela sans réclamation sérieuse de sa part, qu’à épuiser les ressources des contribuables pour accroître les prodigalités de la favorite et les profusions des courtisans. Mais celle de Turgot, qui avait la justice et la raison pour bases, procéda d’une autre manière, et marcha vers un autre but.

Respecter les engagements légitimes contractés par l’État, les acquitter dans la proportion des ressources du Trésor, accroître celles-ci par un meilleur système d’administration, soumettre au régime d’une économie sévère les dépenses de la cour et du gouvernement, éteindre les anticipations et la dette exigible pour échapper à la dépendance ruineuse des financiers ; enfin délivrer l’industrie d’une foule de taxes très-vexatoires et sans importance réelle pour le fisc, tel fut le plan du nouveau contrôleur-général. Son application lui permit de porter à près de 67 millions les recettes extraordinaires de l’année courante, de rembourser 15 millions sur la dette exigible, 28 sur les anticipations, et de gagner l’exercice 1776 avec un déficit qui était tombé au-dessous de 15 millions. Il est vrai que, dans les recettes ci-dessus, entrait un encaisse de 19 millions trouvé dans le Trésor, et une contribution de 16 millions fournie par le clergé ; mais le surplus était le résultat d’augmentations normales obtenues dans la recette, de diminutions effectuées dans la dépense, et de traités plus avantageux faits avec les fermiers ou les régisseurs de l’impôt. Au nombre des opérations de cette dernière espèce, l’on doit citer la réforme de la régie des hypothèques, la cassation du bail des domaines et celle du bail des poudres.

L’abbé Terray avait accepté de la régie des hypothèques, établissement dont il était l’auteur, des conditions fort dures pour l’État. Pour une avance de 8 millions, cette régie tou-

  1. Terray multiplia les maîtrises, et avait même conçu le projet de les rendre héréditaires. L’édit fut signé en 1771, mais on en abandonna l’exécution. On peut voir, dans l’Histoire financière de la France, par M. Bailly, une juste appréciation du ministère de l’abbé.