Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/116

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de tout payer en argent, parce que de cette manière seule il sait exactement ce qu’il lui en coûte, et que par là même il lui en coûte toujours infiniment moins. La dépense en argent est toujours prise sur les revenus ; la dépense en nature diminue souvent la source des richesses. La dépense en argent se répartit sur tous les sujets du roi à proportion de leur fortune ; la dépense en nature frappe au hasard quelques particuliers et attaque la liberté, la plus précieuse certainement de toutes les propriétés. J’ai l’honneur d’être, etc.


seconde lettre. — Sur l’abolition de la corvée pour les transports militaires.
(Limoges, le 10 janvier 1769.)

Monsieur, il y a déjà quelques années que j’ai pris le parti de faire exécuter à prix d’argent, dans cette généralité, la fourniture des voitures et chevaux pour le transport des équipages des troupes, à l’exemple de ce qui se pratiquait depuis plusieurs années en Languedoc et en Franche-Comté. M. l’intendant de Montauban a fait un semblable arrangement à peu près dans le même temps, et M. Fargès en a fait autant à Bordeaux dans le courant de l’année dernière.

Ce n’est pas ici le lieu de m’étendre sur l’avantage de cet établissement, que j’ai tâché de développer assez au long dans une lettre que j’ai écrite à M. de Laverdy le 19 avril 1765[1]. Il paraît qu’on en est assez convaincu, et dès lors M. d’Ormesson était porté à proposer un arrangement général de la même nature pour tout le royaume.

Le marché que j’ai passé avec un entrepreneur pour cette fourniture, et qui devait durer trois ans, expire au 1er février prochain. Je me disposais à le renouveler lorsque j’ai appris, par une lettre que les entrepreneurs généraux des étapes ont écrite à leur directeur dans cette province, que vous pensiez en effet à 4 supprimer dans tout le royaume la corvée des transports d’équipages de troupes, et que la compagnie des entrepreneurs des étapes, dont le marché doit être renouvelé cette année, se proposait de réunir les deux entreprises. Les entrepreneurs chargent même leur directeur de sonder le sieur Michel, entrepreneur de la fourniture des voi-

  1. Cette lettre est la précédente, mais M. de Laverdy avait été remplacé, en octobre 1768, par M. Magnon d’Invau, qui eut, à la fin de 1769, l’abbé Terray pour successeur. (E. D.)