tres sans promettre de les payer. Ce serait même une contradiction avec les motifs de justice qui déterminent le roi.
J’ajoute, pour calmer les inquiétudes de M. le garde des sceaux, que ces corvées, qui n’ont lieu que dans les provinces frontières lorsqu’elles sont le théâtre de la guerre, et qui ne doivent avoir lieu que pour les cas pressés, doivent être assez rares, et seront un objet d’autant moins ruineux pour les finances du roi, qu’il sera toujours facile d’engager l’administration de ces provinces à se charger de payer ceux qu’on aurait été forcé de commander.
J’ajoute encore une autre considération très-importante, c’est qu’il est nécessaire de promettre solennellement ce payement, afin que l’autorité militaire, toujours portée à s’étendre, n’abuse pas de ce moyen, ne le pousse pas à l’excès ; et afin que, sous prétexte du service militaire, on ne se permette pas ces sortes de commandements pendant la paix, pour des transports, pour des constructions de forteresses. L’engagement de payer, et le droit qu’il donne à ceux qui ont été commandés, de réclamer leur payement, forcent de compter, et font passer les comptes sous les yeux de l’administration, ce qui la met en état de connaître les abus et de les réprimer.
Suite des observations du garde des sceaux sur l’art. II. — Cet article me paraît susceptible d’un assez grand nombre de réflexions.
Il assujettit à l’imposition pour le remplacement des corvées tous les propriétaires de biens-fonds et de droits réels, privilégiés et non privilégiés. Il veut que la répartition en soit faite en proportion de l’étendue et de la valeur des fonds.
Il n’excepte des fonds sujets à l’imposition, que les lieux saints, et les dîmes ecclésiastiques seulement.
Il veut que les fonds et les droits des domaines de la couronne y soient assujettis, et y contribuent dans la même proportion que les autres fonds.
Enfin il veut que la répartition en soit faite dans la même forme que celle des autres charges locales et territoriales.
1o Je ne répéterai pas ici ce que j’ai dit, dans mes observations sur le préambule du projet, relativement aux inconvénients que l’on peut trouver en général dans l’établissement d’une imposition territoriale substituée à la corvée de bras et de chevaux ; mais j’observerai qu’il peut être dangereux de détruire absolument tous ces privilèges. Je ne parle pas de ceux qui sont attachés à certains offices, que je ne regarde volontiers que comme des abus acquis à prix d’argent, que comme de véritables privilèges ; mais je ne puis me refuser à dire qu’en France le privilège de la noblesse doit être respecté, et qu’il est, je crois, de l’intérêt du roi de le maintenir.
Réponse de Turgot. — M. le garde des sceaux semble ici adopter le principe que, par la constitution de l’État, la noblesse doit être