Aller au contenu

Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais Votre Majesté sait bien que c’est tout expliqué, et qu’il n’y a rien de plus simple et de plus juste. Personne n’a le droit de porter la main sur la personne sacrée du prince de Galles ; c’était Votre Altesse qui méritait les verges, et c’est moi qui les recevais ; cela est très naturel et très équitable, et s’il en était autrement je perdrais ma charge et mon gagne-pain.

L’enfant disait tout cela d’un ton naïf et convaincu. Tom attachait sur lui de grands yeux, et pensait :

— Voilà qui devient de plus en plus étrange ; je m’étonne que l’on n’ait pas encore songé à prendre quelqu’un qui se fasse peigner et habiller à ma place.

Puis, il dit à voix haute :

— Et as-tu été battu, pauvre enfant, comme on te l’avait promis ?

— Non, sire, pas encore ; c’est aujourd’hui le jour ; mais on me fera peut-être grâce, parce qu’il ne convient point d’user de rigueur un jour de deuil comme celui-ci ; pourtant je ne sais pas ce qu’on fera ; et c’est pour cela que je me suis enhardi à venir ici, et à rappeler à Votre Majesté sa gracieuse promesse d’intercéder pour moi…

— Auprès du maître ? Pour l’empêcher de te donner le fouet ?

— Ah ! sire, vous vous souvenez !

— Oui, la mémoire me revient, comme tu vois. Sois sans crainte ; tu ne pâtiras point, je m’en charge.

— Oh ! merci, mon bon seigneur, s’écria l’enfant en retombant à genoux. Mais peut-être suis-je allé trop loin, et…

Humphrey hésitait. Tom l’encouragea du geste.

— Parle, dit-il, je suis dans un bon moment.