Aller au contenu

Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

donc qu’il ment ? Car, vois-tu, Priny, s’il ne dit pas la vérité, c’est qu’il ment. Ça ne se peut pas autrement. Tout ce qui n’est pas vrai est un mensonge, tu le sais bien.

L’argument était naïf, mais péremptoire. Priny s’en contenta. Elle reporta ses yeux sur l’étranger, puis elle lui dit avec décision :

— Eh bien, si tu me dis que tu es le roi, mais le vrai roi, là, je te croirai.

— Je suis le vrai roi.

Ce premier point admis et la royauté désormais hors de conteste, les petites filles lui demandèrent comment il se faisait qu’il était là, et pourquoi il était si mal habillé, et où il allait, et cent autres choses.

Pour la première fois, le roi se trouvait en présence d’êtres humains à qui il pouvait parler sans avoir à craindre d’être bafoué, rudoyé ou traité de menteur.

Il conta tout au long son histoire, n’oubliant aucun détail, et si sincèrement ému lui-même qu’il ne sentait plus l’horrible faim qui le dévorait.

Les petites filles l’écoutèrent avec recueillement et témoignèrent par leurs gestes et leurs regards combien elles sympathisaient avec lui. Mais lorsqu’il arriva au récit de ses derniers malheurs, lorsqu’elles apprirent qu’il était resté depuis la veille sans manger, elles l’entraînèrent, en courant à toutes jambes, vers la ferme, et crièrent qu’elles allaient lui donner un bon déjeuner.

Le roi avait les larmes aux yeux de contentement.

— Quand j’aurai pris possession de mon trône, se dit-il, je ferai une loi qui obligera tout le monde à aimer les petits enfants ; je me rappellerai toujours