Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/265

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Édouard eût péri de faim sans cette attention d’Andrews, n’ayant point été accoutumé, au palais de Westminster, à manger la grossière nourriture servie aux prisonniers de Hendon Hall.

Les visites du vieillard étaient toutefois de courte durée, afin de ne point éveiller les soupçons. Mais le peu de paroles qu’il disait, en passant, à l’oreille de Miles, et qu’il entrecoupait, pour mieux jouer son jeu, de grossières insultes lancées tout haut, suffisaient pour faire comprendre au frère de Hughes la trame ourdie par l’usurpateur.

Il apprit ainsi qu’Arthur était mort depuis six ans. Cette perte et l’absence de nouvelles de Miles avaient profondément altéré la santé de sir Richard. Celui-ci, sentant sa mort prochaine, avait témoigné le désir de voir l’hymen de Hughes et d’Édith avant l’arrivée de sa dernière heure. Édith résista longtemps, ajournant de mois en mois ce mariage, et espérant toujours que Miles reviendrait.

Un jour, on reçut une lettre où la mort du brave soldat était racontée avec les détails les plus circonstanciés. Ce fut le dernier coup porté à sir Richard. Il insista sur la prompte célébration du mariage. Édith demanda et obtint un mois de répit, puis un autre mois, puis un troisième. Sir Richard s’alita, et la veille de la mort de son tuteur, Édith consentit à donner sa main à Hughes.

Le bruit avait couru, dans le pays, que, peu de temps après son mariage, la châtelaine de Hendon Hall avait trouvé dans les papiers de son mari le brouillon de la lettre prétendûment reçue au sujet de la mort de Miles. On disait que lady Édith avait reproché à Hughes d’avoir hâté son mariage et par suite la mort de sir Richard, et qu’elle l’avait ouvertement accusé