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Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/315

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de pierres précieuses, se trouva complètement isolé, la tête pensive, les yeux baissés.

Lord Saint John ne revint qu’au bout d’une heure. Quand il traversa la nef, les murmures et les conversations s’éteignirent subitement. Tous ceux qui s’étaient rassis se levèrent. Un silence grave et pieux s’étendit sur l’assemblée. Un frémissement circula dans tous les rangs. Les yeux grands ouverts laissaient fouiller jusqu’au fond des âmes. Une fièvre d’espoir dévorait toutes les pensées.

Il monta les marches de l’estrade, s’arrêta, s’inclina et dit :

— Sire, le grand sceau n’y est pas !

Pâles, terrifiés, comme s’ils eussent fui le contact d’un pestiféré, les courtisans se reculèrent et firent le vide autour du mendiant qui osait prétendre au trône. Une minute après, l’inconnu était isolé, comme Tom Canty l’avait été, et les regards pleins de colère et de vengeance se concentraient sur l’insolent.

Le Lord Protecteur s’écria d’une voix retentissante :

— Que l’on jette ce drôle impudent à la porte, qu’on le fouette jusqu’au sang, en le promenant par toute la ville ! Point de pitié pour l’imposteur sans vergogne !

Les officiers de la garde s’élancèrent.

Mais Tom Canty les repoussa de la main :

— Arrière ! Qui le touche s’expose à la mort !

Le Lord Protecteur ne savait plus que faire. Il n’osait braver l’autorité royale ; il ne pouvait laisser durer indéfiniment cette scène, à la fois pénible et dangereuse.

— Avez-vous bien cherché, mylord Saint John ?